Une bactérie pourrait nuire à la motilité des spermatozoïdes

MONTRÉAL — Une bactérie récemment identifiée dans le sperme pourrait nuire à la motilité des spermatozoïdes et entraîner des problèmes de fertilité, révèle une étude réalisée par des chercheurs américains.

Environ la moitié des situations d’infertilité au sein d’un couple sont attribuables à l’homme, rappellent les auteurs de l’étude.

«Le problème, c’est qu’on ne sait pas vraiment quelles sont les causes du problème chez l’homme, a commenté le professeur Bernard Robaire, qui enseigne notamment au département d’obstétrique et de gynécologie de l’Université McGill. La moitié ou les deux tiers des cas sont idiopathiques et on ne sait pas vraiment quelle est la source.»

Ce n’est que tout récemment que les scientifiques ont découvert que le sperme n’est pas un milieu stérile et qu’il possède son propre microbiome, mais aucun inventaire exhaustif de cette flore microbienne n’avait jamais été réalisé auparavant.

Les chercheurs de l’Université de la Californie à Los Angeles se sont attelés à la tâche en étudiant le sperme de 73 hommes; la moitié d’entre eux étaient déjà papas, et l’autre moitié avait consulté pour des problèmes de fertilité.

Les auteurs de l’étude ont identifié cinq bactéries communes aux deux groupes, mais des niveaux élevés de la bactérie Lactobacillus iners ont été associés à des problèmes de motilité (la capacité des spermatozoïdes à « nager » efficacement) dans le groupe infertile.

Encore plus intéressant, les chercheurs soulignent que cette même bactérie se retrouve aussi dans le microbiome vaginal, et que des niveaux élevés peuvent également être associés à des problèmes de fertilité chez la femme.

Cette étude n’est que la toute première à s’intéresser à la question, et les chercheurs sont donc loin de comprendre comment la bactérie L. iners interfère avec la motilité des spermatozoïdes. Une hypothèse met en cause l’inflammation causée par la bactérie. 

D’autres études ont toutefois établi une association entre d’autres membres de la famille Lactobacillus et des problèmes de motilité – ce qui pourrait vouloir dire que la bactérie joue en réalité un rôle utile en freinant les spermatozoïdes les moins vigoureux pour permettre à ceux qui sont les plus en santé de rejoindre l’ovule.

«La question qu’il faut se poser est: « Est-ce que ces bactéries sont présentes dans le système de reproduction ou bien est-ce qu’elles sont associées à d’autres tissus? », a demandé le professeur Robaire. Ce n’est pas encore clair où et comment ces bactéries sont introduites dans le système reproducteur.»

Cela étant dit, poursuit-il, l’identification de cette bactérie dans le sperme d’hommes qui présentent des problèmes de fertilité pourrait éventuellement mener à de nouveaux tests diagnostics, voire à des traitements, même si cela n’est pas pour demain.

Malheureusement, l’efficacité de la fécondation in vitro a réduit le nombre de recherches qui se font sur les causes de l’infertilité masculine, a rappelé le professeur Robaire. Et même si le problème se trouve du côté de l’homme, ce sera souvent la femme qui subira les conséquences du traitement, «donc c’est très important d’essayer de comprendre la source d’infertilité chez l’homme».

«La fécondation in vitro est une solution facile, a dit le professeur Robaire. Mais c’est une solution qui revient chère pour les malades et les cliniques de fécondation en profitent d’un point de vue pécuniaire.»

Les conclusions de cette étude ont été publiées par le journal Scientific Reports.