Un étudiant iranien se voit refuser un permis d’études

OTTAWA — Un Iranien conteste la décision du gouvernement fédéral de lui refuser un permis pour étudier dans une université de Montréal parce qu’il est considéré comme un danger pour la sécurité du Canada.

L’avocat de Reza Jahantigh affirme que son client a été bouleversé en apprenant le refus et qu’il demandera une révision judiciaire devant la Cour fédérale.

Cette décision du ministère de l’Immigration du mois dernier est la dernière indication qu’Ottawa resserre les restrictions sur les universitaires considérés comme présentant un risque pour la sécurité nationale.

En octobre 2019, M. Jahantigh a demandé un permis d’études pour poursuivre un doctorat en génie informatique à l’École de technologie supérieure de Montréal.

M. Jahantigh, dont les recherches sont liées à la technologie de chaîne de blocs, a terminé les premières sessions de son programme en ligne depuis l’Iran, à partir de 2020. Cependant, le programme l’oblige à suivre en personne les cours restants de son doctorat.

L’avocat Samin Mortazavi, qui représente M. Jahantigh, affirme n’avoir trouvé aucune preuve que les activités de l’étudiant constituent un danger pour le Canada.

«Je ne vois aucun problème de sécurité, a déclaré Me Mortazavi lors d’un entretien. C’est juste un doctorant typique.»

M. Jahantigh a pleuré pendant deux ou trois minutes d’affilée lorsqu’on lui a appris le refus du permis, a relaté M. Mortazavi: «Il ne pouvait même pas me parler.»

Un danger pour la sécurité

En décembre 2022, après avoir attendu plus de trois ans sa demande de permis d’études, M. Jahantigh a demandé à la Cour fédérale d’intervenir et d’ordonner au ministère de l’Immigration de prendre une décision.

En septembre dernier, la veille de l’audition de la demande judiciaire, un agent d’immigration canadien à Ankara, en Turquie, a publié une lettre affirmant que le ministère avait des motifs raisonnables de croire que M. Jahantigh pourrait être interdit de territoire au Canada en vertu de la loi fédérale sur l’immigration parce qu’il «représente un danger pour la sécurité du Canada».

Le responsable, qui n’était pas nommé, a noté que M. Jahantigh, aujourd’hui âgé de 33 ans, avait déclaré son service dans l’armée iranienne en tant que technicien de juin 2016 à mars 2018. M. Jahantigh est ensuite devenu employé à temps plein dans une entreprise privée, accédant au poste d’ingénieur logiciel principal.

L’agent d’immigration s’est dit préoccupé par «le travail que vous auriez pu faire» dans l’entreprise, son travail antérieur en tant qu’assistant de recherche et «les futurs domaines de recherche possibles tout en complétant vos études de doctorat qui peuvent être considérés comme des domaines de recherche sensibles».

«Rien n’exige qu’une personne interdite de territoire au Canada pour des raisons de sécurité soit personnellement impliquée dans des actes de violence, indique la lettre de l’agent. La menace n’a pas besoin d’être directe; elle peut plutôt être fondée sur des événements lointains qui ont indirectement une possibilité réelle de nuire à la sécurité du Canada.»

M. Mortazavi a déclaré que M. Jahantigh, comme d’autres jeunes Iraniens, devait effectuer quelques années de service militaire.

De plus, l’entreprise privée qui a embauché le jeune homme est impliquée dans le développement de jeux vidéo et non dans des travaux liés au gouvernement iranien, a ajouté l’avocat.

L’agent d’immigration a donné à M. Jahantigh 30 jours pour soumettre des informations supplémentaires.

Le 18 décembre, le ministère a confirmé ses conclusions préliminaires et a rejeté la demande de permis de M. Jahantigh pour des raisons de sécurité.

Le Canada resserre les restrictions

Ottawa prévient que des nations hostiles tentent d’exploiter des segments clés de l’économie canadienne pour faire progresser leurs propres intérêts stratégiques militaires, de renseignement, de sécurité et économiques. Le Canada a publié des lignes directrices sur la sécurité de la recherche visant à protéger les institutions et la propriété intellectuelle.

Dans un jugement rendu la semaine dernière, la Cour fédérale a confirmé une décision refusant un permis d’études à un Chinois qui avait été déclaré interdit de territoire au Canada pour des raisons de sécurité.

Dans cette affaire, le tribunal a confirmé qu’il existait des motifs raisonnables de croire que Yuekang Li pourrait se livrer à un acte d’espionnage contre le Canada.

M. Li, qui souhaitait étudier à l’Université de Waterloo, avait obtenu un baccalauréat en génie mécanique d’une université chinoise qui entretient des relations étroites avec l’industrie de la défense de ce pays.