Un comité se penchera sur l’incident concernant le président de la Chambre

OTTAWA — Un comité parlementaire se penchera sur la suite des choses pour le président de la Chambre, Greg Fergus, mais un scénario où une majorité d’élus aux Communes réclament sa démission ne s’est pas concrétisé pour l’instant.

Une motion du leader parlementaire conservateur, Andrew Scheer, a été adoptée unanimement mercredi soir, et celle-ci mentionne que le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre doit recevoir l’«instruction de demander une mesure corrective appropriée».

Le texte a donc notamment été entériné aux Communes par les députés du Parti libéral, dont fait partie M. Fergus en tant qu’élu de la circonscription de Hull-Aylmer.

La motion renvoie en comité les questions d’impartialité soulevées par une apparition virtuelle du président de la Chambre à un événement partisan ayant eu lieu au courant du week-end.

Il reste à voir le sens que donneront à «mesure corrective appropriée» les élus de différentes allégeances siégeant au comité de la procédure.

Dès le début de la semaine, les bloquistes ont demandé à M. Fergus de renoncer aux fonctions qu’il occupe depuis octobre. Les conservateurs ont joint leur voix après avoir soumis le dossier, de façon plus générale, sur le plancher des Communes.

Les libéraux, de leur côté, ont signalé qu’ils maintenaient leur confiance envers le président de la Chambre, pendant que les néo-démocrates ont, eux, déclaré qu’ils jugent «irresponsable», à ce point-ci, d’exiger la démission de M. Fergus. Les deux formations politiques ont insisté sur les moyens d’éviter qu’un tel incident ne se reproduise.

Les libéraux forment une minorité en Chambre, mais atteignent une majorité si on y additionne les élus néo-démocrates.

Au comité de la procédure, les troupes de Justin Trudeau et de Jagmeet Singh comptent plus de membres que les conservateurs et bloquistes.

Chose certaine, tous les principaux partis se sont entendus pour que les conclusions du groupe d’élus soient retournées à l’ensemble des députés rapidement, soit d’ici au 14 décembre.

La motion énonce, entre autres échéances serrées, que les membres du comité devraient se rencontrer dans les 24 heures après que le renvoi du dossier ait été fait.

«On trouve que quelque chose d’aussi sérieux doit être fait dans les plus brefs délais. On ne laisse pas traîner pendant des semaines et des semaines», a soutenu le leader parlementaire néo-démocrate, Peter Julian.

Le chef bloquiste Yves-François Blanchet a abordé, la veille, la rapidité sous un tout autre angle. «Qu’il démissionne, c’est beaucoup plus rapide qu’un comité», a-t-il dit mardi au sujet de M. Fergus.

Les critiques à l’endroit du président de la Chambre fusent depuis la diffusion, au congrès du Parti libéral de l’Ontario, d’un message capté sur vidéo dans lequel il remercie le chef intérimaire sortant de cette formation politique, John Fraser.

Avant de se récuser du dossier, lundi, le président de la Chambre a déclaré qu’on lui avait demandé un tel enregistrement pour une réunion privée en l’honneur de M. Fraser, qu’il considère comme un ami de longue date.

L’élu québécois a indiqué aux députés qu’il regrettait que la vidéo ait été utilisée à d’autres fins. Il a précisé qu’il n’était pas membre du Parti libéral de l’Ontario et qu’il n’avait pas voté dans la province depuis 30 ans.

M. Scheer a relevé, dès le départ, que le président de la Chambre portait l’habit officiel de ses fonctions au cours de son message de remerciements à M. Fraser et que le bureau de la présidence était reconnaissable en arrière-plan.

«Si nous pensons à ce qui se produirait si un arbitre de la LNH (Ligue nationale de hockey) était vu dans le vestiaire d’une des équipes, portant son habit d’arbitre et livrant en quelque sorte des mots d’encouragement ou des messages positifs à l’équipe qui s’apprête à (aller) sur la glace, combien de temps pensons-nous qu'(il) resterait dans ce poste?» a lancé lundi l’élu conservateur, qui a déjà occupé le siège de président de la Chambre.

D’autres députés de différentes allégeances ont ensuite aussi déploré cette utilisation du titre et des ressources de la présidence.

M. Fergus devait revenir à Ottawa tard mercredi, a indiqué son bureau, après un séjour à Washington, aux États-Unis

Cette «mission de deux jours» avait lieu «à la suite de plusieurs semaines de planification», a-t-on fait savoir. Elle comprenait une rencontre avec l’ancienne présidente de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, une autre avec «des membres du Congressional Black Caucus» et un entretien avec les «co-présidents du Groupe interparlementaire Canada—États-Unis».

M. Scheer a reproché au président de la Chambre, sur les réseaux sociaux, d’avoir profité d’un moment de son séjour à Washington pour «revivre l’époque où il était à la tête des jeunes libéraux».

Dans un extrait vidéo qu’il a partagé, on peut voir et entendre M. Fergus faire référence à une rencontre qu’il a faite quand il faisait campagne pour devenir président des jeunes libéraux, poste qu’il a finalement occupé.

Le bureau de M. Fergus n’a pas voulu répondre, mercredi, aux commentaires de M. Scheer «alors que la Chambre est saisie de cette question».

On a néanmoins précisé que l’extrait «est tiré d’un bref discours prononcé par le président (de la Chambre) à un événement du chapitre nord-américain de la Fondation Friedrich Naumann, un organisme multipartite voué au rapprochement social et économique de l’Amérique du Nord et de l’Europe».

Questionné au sujet de la mention de l’expérience de M. Fergus au sein des jeunes libéraux, M. Julian a répondu qu’il juge cela inapproprié.

La leader en Chambre du gouvernement, Karina Gould, a affirmé que «le président est indépendant» quand elle a été appelée à se prononcer sur le séjour de ce dernier à Washington.