Secteur public: «l’heure est grave»; pas de date de grève illimitée encore

MONTRÉAL — Le front commun du secteur public n’arrête pas encore de date pour le déclenchement de sa grève illimitée «au début de 2024», malgré l’impasse. Il dit continuer de croire à un règlement possible d’ici la fin de l’année si les négociations s’intensifient encore et si des mandats sont donnés pour financer les solutions aux problèmes vécus en santé et en éducation.

Les quatre dirigeants de la CSN, de la CSQ, de l’APTS et de la FTQ ont rencontré la presse, mercredi matin, essentiellement pour réitérer leur volonté de régler, pas de faire la grève illimitée, même s’ils en ont eu le mandat à 95 %.

Ils assurent néanmoins que leur menace de grève illimitée n’est pas un bluff et qu’elle sera exercée «au début de 2024» si les progrès ne sont pas suffisants aux tables de négociation.

«L’heure est grave. Ce qu’on demande, c’est une négociation intensive», a lancé la présidente de la FTQ, Magali Picard.

Les quatre se disent prêts à négocier durant les Fêtes s’il le faut, à rencontrer personnellement le premier ministre François Legault. Mais le président de la CSQ, Éric Gingras, ne croit pas que la négociation ait suffisamment progressé pour planifier une rencontre avec M. Legault. «Pour nous, ce n’est pas assez avancé.»

Appelé à donner une note à l’état d’avancement des négociations, le vice-président de la CSN, François Enault, a donné un 5 sur 10 aux tables sectorielles — celles où sont négociées les conditions de travail comme le fardeau de tâches, la composition des classes — et un 6,5 à la table centrale — celle où sont négociés les salaires, le régime de retraite, les disparités régionales.

Les quatre reprochent au gouvernement de ne vouloir négocier qu’à partir de ses solutions à lui et de rejeter du revers de la main les solutions apportées aux mêmes problèmes par les syndicats.

«C’est un gouvernement qui essaie de mener seul et de ne pas écouter personne; il est en train de frapper le mur. Pour moi, François Legault, il conduit une voiture en sens contraire dans le tunnel; toutes les voitures lui font face et il continue à être convaincu qu’il est le seul dans la bonne direction», a illustré Mme Picard.

Elle juge que «c’est lui qui perd actuellement l’opinion publique», et non les syndicats en grève.

Malgré tout, les dirigeants syndicaux croient possible de régler d’ici quelques jours, voire 48 ou 72 heures, si le gouvernement le veut vraiment. Mme Picard a évoqué des cas où une entente aussi rapide s’est déjà vue, mais «ça prend de la volonté, des mandats».

Dépôt de la FSE et réunion de la FAE

Pendant ce temps, la Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE), affiliée à la CSQ, a déposé mercredi matin une nouvelle proposition à Québec, à sa table sectorielle, au lendemain de son rejet de la dernière offre de Québec.

La présidente de la FSE, Josée Scalabrini, avait qualifié de «show de boucane» cette dernière offre patronale, mardi soir.

Cette proposition de la FSE porte sur l’allègement de la tâche des enseignants et la composition de la classe — les deux priorités de la FSE.

La fédération syndicale de la CSQ représente 95 000 enseignants des niveaux primaire et secondaire.

La Fédération autonome de l’enseignement (FAE), quant à elle, a fait savoir en fin de journée, mercredi, qu’elle rejetait la dernière offre patronale présentée mardi.

«Contrairement aux propos véhiculés hier par la présidente du Conseil du trésor, Sonia LeBel, et par le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, cette nouvelle offre contient des reculs importants pour les enseignantes et enseignants ainsi que pour leurs élèves et ne constitue pas une entente de principe satisfaite pour répondre aux besoins criants de l’école publique», affirme la FAE dans un communiqué.

La présidente de la FAE, Mélanie Hubert, accuse d’ailleurs le gouvernement Legault d’avoir «opté pour une stratégie d’épuisement des profs, en laissant perdurer ce conflit, ce qui est complètement inacceptable et irresponsable quand on considère la souffrance enseignante et les impacts du manque de services de qualité aux élèves».

Les 66 000 membres de la FAE sont en grève illimitée depuis quatre semaines, soit depuis le 23 novembre.

La FIQ en analyse

Quant à la Fédération interprofessionnelle de la santé (FIQ), qui représente 80 000 infirmières, infirmières auxiliaires et autres professionnelles en soins, une de ses instances était aussi réunie, mercredi, pour faire le point sur sa négociation et son mandat de grève.

La veille, la FIQ avait demandé et obtenu du ministère du Travail la nomination d’un conciliateur à son dossier, après 75 séances de négociation. 

Le premier ministre Legault lui-même a souligné que les négociations en santé étaient difficiles, au point où il n’entrevoyait pas de règlement possible avant le mois de janvier.