Ottawa doit cesser d’appuyer la militance anglophone au Québec, insiste le Bloc

OTTAWA — Le gouvernement fédéral doit cesser d’appuyer les groupes militants de la communauté anglophone au Québec et plutôt utiliser l’essentiel des près de 820 millions $ dédiés à la province dans le nouveau Plan d’action pour les langues officielles afin de promouvoir le français, réclame le Bloc québécois.

«C’est le français qui est en déclin au Québec. Ce n’est pas l’anglais! Alors je ne vois pas la logique de financer l’anglais. (…) L’anglais se porte très bien, même de plus en plus en progrès si on regarde les études de projection linguistique», a déclaré lundi le porte-parole bloquiste en matière de langues officielles, Mario Beaulieu.

M. Beaulieu dévoilait à ce moment une analyse qu’il a réalisée sur la politique linguistique fédérale qui a pour conséquence, conclut-il, de «financer l’anglicisation du Québec».

En épluchant les comptes publics, le député a calculé qu’au Québec, depuis 1995, pas moins de 2,1 milliards $ de fonds fédéraux ont été dédiés aux communautés de langues officielles en situation minoritaire, une «langue de bois», comme il l’appelle, qui, dans le cas présent, fait référence aux anglophones.

Il s’est insurgé que des groupes d’intérêt mènent des campagnes pour promouvoir l’anglais, y compris auprès des nouveaux arrivants qui seraient mis en contact avec le réseau anglophone.

«Le gouvernement fédéral, avec cet argent-là, il ne vise pas seulement à ce qu’il y ait des services en anglais pour la minorité historique anglophone. Il vise à ce qu’il y ait des services en anglais pour les nouveaux arrivants qu’on dit d’expression anglaise», a déclaré le député.

Dans son Plan d’action pour les langues officielles dévoilé le printemps dernier, Ottawa prévoit dépenser 4,1 milliards $ à l’échelle du pays et, historiquement, environ 20 % des sommes vont à la communauté anglophone du Québec, selon le ministère du Patrimoine canadien, ce qui correspond ici à environ 820 millions $.

Lors d’un témoignage en comité parlementaire le mois dernier, le ministre des Langues officielles, Randy Boissonnault, avait annoncé que le gouvernement entend consacrer 50 millions $ des fonds destinés à la communauté anglophone du Québec pour des programmes de francisation.

M. Beaulieu juge qu’Ottawa devrait rediriger les fonds vers la promotion du français «dans une marge qui a de l’allure» et non à hauteur de «94 % ou à 95 % pour l’anglais», comme ce serait le cas actuellement, selon ses estimations. Et tant qu’à faire une redirection, idéalement, Ottawa devrait transférer l’argent au Québec.

«C’est au Québec d’être le maître d’œuvre de sa politique linguistique, a-t-il lancé. Ce n’est pas normal. On est supposé (de) nous reconnaître comme une nation. Est-ce que c’est normal pour une nation que ça soit une autre nation qui gère ce qui la définit, sa langue, sa culture? Ça n’a pas de sens!»

M. Beaulieu a dit souhaiter que son étude permette de faire connaître les données «au plus grand nombre possible de Québécois, que les gens réalisent ce qui se passe». Ceux-ci, dit-il, ignorent généralement cette situation et la désapprouvent.

Lors de la période des questions à la Chambre des communes, la ministre du Tourisme, Soraya Martinez Ferrada, s’est d’abord levée pour rappeler que c’est le gouvernement Trudeau qui a été le premier à reconnaître le déclin du français au Québec.

Elle a ensuite reproché au Bloc des calculs «tendancieux» alors qu’Ottawa «donne au Québec 500 à 700 millions $ par année depuis 30 ans pour faire la francisation, qu’on aide Radio-Canada, qu’on aide Téléfilm».

Cela n’a pas convaincu Mario Beaulieu. Il a répliqué reconnaître «nos libéraux» qui affirment se préoccuper de l’avenir du français, mais dont «les bottines ne suivent pas les babines» et a réclamé que les centaines de millions du plan d’action soient redirigés «vers le français plutôt que d’angliciser le Québec».

Le lieutenant du premier ministre Justin Trudeau pour le Québec, Pablo Rodriguez, lui a alors renvoyé que «le Bloc, il cherche clairement la chicane» et à «faire une division entre les Québécois». 

«Est-ce que le Bloc, un jour, va finir par comprendre et par accepter qu’un Québécois, c’est un Québécois, peu importe sa langue maternelle?» a-t-il renchéri.

De 2016 à 2021, Statistique Canada a observé une baisse de la proportion de Québécois qui avaient le français comme langue maternelle (de 77,1 % à 74,8 %), comme langue parlée de façon prédominante à la maison (de 79,0 % à 77,5 %) et comme première langue officielle parlée (de 83,7 % à 82,2 %).

La tendance est là même lorsqu’il est question de pouvoir soutenir une conversation en français (de 94,5 % à 93,7 %) et de la langue la plus souvent utilisée dans les milieux de travail (de 79,9 % à 79,7 %).