Même éteint, un cellulaire nuit à l’apprentissage des étudiants, rapporte l’INSPQ

MONTRÉAL — Les appareils numériques sont omniprésents dans les classes, notamment en raison des habitudes de connectivité des jeunes et du virage numérique des milieux scolaires. Les écrans sont toutefois loin d’améliorer l’apprentissage, bien au contraire. Même un cellulaire éteint sur un bureau a une incidence négative sur la performance académique. 

C’est ce que démontre une nouvelle étude de lInstitut national de santé publique du Québec (INSPQ), mandaté parle ministère de la Santé et des Services sociaux afin de mieux comprendre «les effets de l’usage des écrans sur la cognition des jeunes de moins 25 ans en contexte scolaire». 

Le temps d’utilisation des écrans chez les jeunes a été exacerbé depuis la pandémie. Lorsque l’usage est excessif, cela peut avoir des effets négatifs sur le langage, la mémoire et la réussite scolaire, souligne l’étude. 

Tania Tremblay, conseillère scientifique spécialisée à la direction du développement des individus et des communautés chez l’INSPQ et auteure de l’étude, soulève que la présence du cellulaire, même sans son utilisation, entraînerait des effets négatifs sur différentes dimensions de la cognition. Entre autres, la présence du cellulaire en classe risque d’entraver le bon fonctionnement de la mémoire de travail. 

«Cette conclusion est des plus importantes pour deux raisons. D’une part, le développement cognitif des jeunes repose en grande partie sur la mémoire de travail, notamment parce qu’elle contribue de manière déterminante aux habiletés intellectuelles, mathématiques et langagières», est-il écrit dans l’étude de Mme Tremblay. 

Cela joue également un rôle crucial dans l’apprentissage de nouvelles connaissances puisque la mémoire de travail permet de traiter les informations nouvelles, de les combiner avec des connaissances antérieures et de les transférer dans la mémoire à long terme. 

Un autre résultat intéressant sur l’apprentissage dans un milieu numérique est que l’usage des écrans dans un contexte pédagogique pour lire et prendre des notes «n’apporterait aucune valeur ajoutée à la compréhension de texte ou à l’apprentissage». Pour la lecture, les écrans seraient même nuisibles à la compréhension de texte, fait valoir le rapport. 

La synthèse des résultats de l’étude indique que la compréhension est significativement plus faible lorsque le texte se présente sous forme numérique plutôt que sur papier. De plus, la prise de notes numériques n’a aucun effet positif sur l’apprentissage, ni pour la mémoire ni pour la compréhension. 

Les notes à la main meilleures pour l’apprentissage

Une grande proportion des étudiants postsecondaires prennent leurs notes de cours à l’aide d’un ordinateur portable. Cela ne serait pas aussi efficace pour bien intégrer la matière que la prise de note manuscrite. 

Les recherches de Mme Tremblay montrent que les notes sur un ordinateur n’entraîneraient pas un encodage immédiat aussi efficace que la prise de notes à la main. «L’étudiant qui tape ses notes à l’aide d’un clavier tend à reproduire sous forme de verbatim les informations entendues plutôt que de les manipuler activement pour les reformuler, les interpréter et les résumer, des actions qui exigent un grand engagement cognitif», écrit-elle.

Les mouvements de la main pour écrire permettent aussi de renforcer le processus d’encodage de l’information. 

«Dans un contexte où 46 % de la population québécoise aurait de la difficulté à comprendre un texte long et dense, ce résultat invite le milieu scolaire à reconsidérer l’usage d’appareils numériques pour lire et prendre des notes afin d’offrir un environnement scolaire qui assure pour tous le développement des compétences en littératie», peut-on lire dans le rapport de l’INSPQ. 

On cite qu’en mai dernier, la Suède a d’ailleurs décidé de réintroduire la lecture papier en classe afin d’améliorer les compétences en compréhension de l’écrit de ses élèves au primaire et au secondaire. 

Selon la majorité des études analysées par Mme Tremblay, l’utilisation du cellulaire ou autre appareil à des fins personnelles, comme texter ou naviguer sur les réseaux sociaux, nuit à l’apprentissage. 

Toutefois une étude soutient que la distraction numérique en classe n’affecterait pas autant les jeunes d’aujourd’hui puisqu’ils seraient capables d’effectuer plusieurs tâches en même temps en conservant une «performance optimale». 

Rappelons que la directive de Québec interdisant les cellulaires dans les salles de cours est entrée en vigueur au début de l’année 2024, faisant de la province la deuxième à mettre en œuvre une telle mesure au Canada, après l’Ontario.

Plusieurs pays sont allés plus loin que le Québec et l’Ontario sur cet enjeu, notamment la France qui a banni en 2018 les cellulaires dans ses cours d’école pour les moins de 15 ans. 

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