McGill et Concordia en cour pour contester la hausse des droits de scolarité

MONTRÉAL — Les universités McGill et Concordia ont annoncé vendredi qu’elles se tournaient maintenant vers les tribunaux pour contester la hausse des droits de scolarité pour les étudiants provenant de l’extérieur du Québec adoptée par le gouvernement Legault.

Dans leurs deux poursuites distinctes déposées devant la Cour supérieure, les établissements universitaires anglophones de Montréal soutiennent que la décision du gouvernement constitue une discrimination en vertu de la Charte des droits et libertés et que les hausses ont porté atteinte à la réputation des écoles.

Les poursuites remettent également en question le nouveau modèle de financement du gouvernement pour les étudiants internationaux, selon lequel les établissements devront payer 20 000 $ pour chaque étudiant étranger admis, l’argent étant reversé aux universités de langue française.

Dans des déclarations partagées sur leurs sites respectifs, les recteurs assurent qu’ils n’ont plus d’autres recours, après avoir tenté en vain de trouver des solutions avec le gouvernement du Québec.

«Nous n’avons ménagé aucun effort pour travailler en partenariat avec le gouvernement. Nous aurions voulu éviter l’action en justice, mais nous ne voyons pas d’autre solution viable», a plaidé Deep Saini, recteur de l’Université McGill, dans une note adressée aux «membres de la communauté mcgilloise».

«Bien que le gouvernement ait revu à la baisse les nouveaux droits de scolarité qu’il proposait d’imposer aux étudiantes et étudiants des autres provinces, il n’a jamais véritablement travaillé avec nous pour prendre en compte – et encore moins résoudre – les vastes préoccupations que nous avons exprimées», a renchéri le recteur de l’Université Concordia, Graham Carr, dans une lettre publiée sur le site web de l’établissement.

Les frais de scolarité doivent passer de 9000 $ à 12 000 $ pour les étudiants hors province l’automne prochain, à l’exception de la seule autre université anglophone du Québec – Bishop’s – qui en a été exemptée, car elle se trouve à l’extérieur de Montréal.

Appelé à réagir, le bureau de la ministre de l’Enseignement supérieur, Pascale Déry, a préféré réserver ses commentaires «puisque le dossier est judiciarisé».

Mesure discriminatoire 

McGill dit contester la hausse puisqu’elle est «discriminatoire», qu’elle découle d’un «exercice déraisonnable» du pouvoir de la ministre de l’Enseignement supérieur et qu’elle a été adoptée «sans consultation en bonne et due forme».

L’établissement demande également un sursis au tribunal pour que la mesure soit suspendue en attendant qu’il se prononce sur le fond de l’affaire.

Concordia argue de son côté que Québec aurait dû dans sa prise de décision considérer des valeurs inhérentes à la Charte canadienne des droits et libertés, dont l’égalité entre les groupes linguistiques francophone et anglophone et la protection de la minorité anglophone au Québec.

«Nous soutenons qu’en plus de tenir compte de ces valeurs, le gouvernement avait la responsabilité de s’assurer que ses politiques ne nuisent pas à notre établissement», a affirmé M. Carr.

Les deux universités affirment malgré tout qu’elles sont déterminées à mettre en place des mesures de francisation pour les étudiants non francophones.

Et McGill se dit ouverte à reprendre le dialogue avec Québec.

«Cela dit, bien que les mesures annoncées commandent une vive réplique, nous demeurons résolus à travailler de concert avec le gouvernement du Québec», a indiqué le recteur Deep Saini.

Baisse des candidatures

Le gouvernement du Québec a défendu les hausses des frais de scolarité, affirmant qu’elles ont été imposées, en partie, parce qu’il y a trop de gens qui parlent anglais à Montréal.

Au départ, le gouvernement avait menacé de presque doubler les frais de scolarité, les faisant passer de 8992 $ à 17 000 $, mais il a ensuite réduit l’augmentation à 3000 $.

Mais les établissements soutiennent avoir enregistré une baisse importante des candidatures depuis que le Québec a annoncé la hausse des frais de scolarité en octobre et avertissent que cela pourrait déclencher une forte baisse des inscriptions et dévaster leurs finances.

«En raison de ces mesures et des coûts financiers qui y sont associés, les étudiantes et étudiants hésitent à venir chez nous. Selon les équipes de recrutement, certains ne se sentent plus les bienvenus au Québec depuis l’annonce», note M. Saini dans sa déclaration.

«Je suis particulièrement troublé par la situation, puisque je connais la chaleur et l’hospitalité québécoises, et je sais à quel point les employeurs d’ici ont besoin de ces jeunes gens bourrés de talent et les recherchent.»