L’ONU demande l’aide du Canada pour endiguer la violence fondée sur le genre

OTTAWA — Une initiative des Nations Unies visant à éliminer la violence fondée sur le genre demande au Canada de fournir de l’argent pour aider à endiguer le recul des droits des femmes, même si les libéraux réduisent l’aide étrangère.

«Les droits des femmes et la violence contre les femmes et les filles ne sont pas une question secondaire», a souligné Nahla Valji, conseillère principale en matière d’égalité des sexes à l’ONU, un poste que le Canada a poussé à créer au siège de l’agence à New York.

Mme Valji, qui a grandi à Burnaby, en Colombie-Britannique, est sur la colline du Parlement cette semaine pour demander au premier ministre Justin Trudeau d’aider à freiner l’érosion des droits des femmes dans le monde.

Elle donne suite à une lettre de la sous-secrétaire générale des Nations Unies, Amina Mohammed, qui a demandé à M. Trudeau d’aider à financer ce qu’on appelle l’Initiative Spotlight.

Le projet a été lancé en 2017 avec l’engagement de l’Union européenne de 500 millions d’euros, soit environ 740 millions $CAN, pour des projets visant à lutter contre la violence sexiste et à donner aux femmes une place à la table des négociations post-conflit.

L’Initiative Spotlight travaille dans deux douzaines des pays les plus pauvres du monde, aidant des groupes locaux à lancer des projets qui fournissent des emplois aux femmes tout en éliminant la violence.

Par exemple, un projet au Liberia a travaillé avec des aînés et des groupes féministes dans ce pays d’Afrique de l’Ouest pour aider à faire respecter une interdiction nationale de l’excision, également connue sous le nom de mutilation génitale féminine. Spotlight Initiative a également dispensé une formation afin que les personnes qui avaient l’habitude d’effectuer cette pratique puissent à la place trouver des emplois dans l’agriculture.

Pourtant, la demande de Mme Valji arrive à un moment où de nombreux pays connaissent des changements drastiques.

Le régime taliban afghan a interdit aux femmes d’aller à l’école, les organisations criminelles en Haïti érigent en armes la violence sexuelle dans leurs guerres de territoire. Le taux de féminicide au Honduras, au Salvador et au Guatemala est comparable à celui des pays en situation de conflit, souligne-t-elle.

«Pendant de multiples crises à l’échelle mondiale et la prolifération de la violence contre les femmes et les filles, nous avons en fait été en mesure de prouver un modèle de réussite», a fait valoir Mme Valji.

Le bureau de Nahla Valji n’a pas voulu partager la lettre, mais a déclaré qu’il «invite le Canada à être un partenaire dans l’augmentation de l’investissement» d’ici la fin de 2023. Il n’a pas précisé de montant.

Elle s’appuie sur la rhétorique des libéraux pour mettre les femmes au centre de leurs efforts diplomatiques, comme par le biais d’une politique d’aide féministe.

«Le Canada a toujours été un chef de file sur la scène internationale, depuis Lester B. Pearson jusqu’à aujourd’hui, en termes de multilatéralisme», a-t-elle soutenu.

«Tout au long de l’histoire, le Canada est passé de la parole aux actes en ce qui concerne les valeurs de la charte [de l’ONU].»

Le gouvernement dit qu’il évalue la demande. Mais en même temps, les compressions fédérales obligent le secteur du développement à se préparer à réduire les programmes.

Les libéraux insistent sur le fait qu’une baisse de 15 % du financement de l’aide étrangère n’est pas réellement une réduction, car elle est supérieure à leurs dépenses d’avant la pandémie.

M. Trudeau a été confronté à des questions à ce sujet la semaine dernière lors de l’événement Global Citizen Now à New York. Il a souligné qu’une recrudescence des crises humanitaires signifie que le Canada dépensera davantage pour le soutien réactif, même si les dépenses proactives pour les projets de développement sont de retour à peu près au même niveau qu’avant la pandémie de COVID-19.

Pourtant, Mme Valji a déclaré que le Canada est l’un des meilleurs pays au monde pour tenter de lutter contre la violence sexiste, en partie en admettant ses propres problèmes à la maison.

«Ce rôle de leadership qu’ils jouent sur la scène internationale a également été une réflexion sur le fait qu’aucun pays au monde n’a atteint l’égalité des sexes», a-t-elle mentionné.

Elle a noté que l’ambassadrice du Canada pour les femmes, la paix et la sécurité, Jacqueline O’Neill, est responsable non seulement de défendre les femmes à l’étranger, mais aussi de voir ce que le Canada peut apprendre de la façon dont d’autres pays font des progrès pour les femmes.