Les frigos communautaires de plus en plus utilisés dans les provinces de l’Atlantique

HALIFAX — Les réfrigérateurs et garde-manger extérieurs, souvent peints dans des couleurs vives et invitantes, font leur apparition partout au Canada atlantique, et les gens qui les stockent régulièrement affirment que la demande augmente.

Les réfrigérateurs ou garde-manger communautaires, généralement gérés par des bénévoles ou des groupes communautaires, sont des espaces de stockage surveillés qui offrent des aliments gratuits, frais et non périssables. Le modèle consiste à rendre la nourriture disponible à toute heure de la journée, avec moins d’obstacles que les banques alimentaires traditionnelles.

Alors que le coût de la vie, en particulier celui de la nourriture, continue d’augmenter, ces projets mettent en évidence la façon dont les voisins s’entraident pour éviter de souffrir de la faim. Mais les organisateurs communautaires et les experts en matière d’insécurité alimentaire affirment que les réfrigérateurs communautaires ne remplacent pas le filet de sécurité sociale que les gouvernements sont chargés de maintenir.

Christene Nottegar, bénévole au Dartmouth Community Fridge — l’un des plus grands réfrigérateurs de ce type dans la région d’Halifax — a déclaré que même si son groupe ne suit pas l’utilisation de l’espace de stockage des aliments, la demande semble augmenter.

«Une estimation prudente serait qu’il y a au moins dix personnes qui accèdent au réfrigérateur toutes les heures pendant la journée», a indiqué Mme Nottegar.

«Nous voyons maintenant des gens faire la queue et attendre de la nourriture. Souvent, les gens viennent attendre parce qu’ils savent que la nourriture va arriver, alors ils attendent parfois des heures.»

Le réfrigérateur, situé à côté d’une église de Dartmouth, est peint en bleu vif avec des fleurs jaunes gaies et indique: «Prenez ce dont vous avez besoin, laissez quelque chose si vous le pouvez».

Lancée pour la première fois en mai 2022, l’initiative comprend un réfrigérateur, un congélateur et un garde-manger, et est liée à la Public Good Society of Dartmouth and Christ Church, qui l’héberge sur sa propriété. En plus d’accepter les dons de nourriture des membres de la communauté, le Dartmouth Community Fridge accepte les dons monétaires et ses bénévoles achètent des aliments sains et frais pour les garder bien approvisionnés.

Un problème de plus en plus grave

Peter Andrée, professeur à l’Université Carleton qui étudie les systèmes alimentaires durables, a dit dans une entrevue que ces projets tentent de résoudre un problème qui «ne fera que s’aggraver».

Il a affirmé que le changement climatique entraînera une augmentation du prix des denrées alimentaires, car la fréquence croissante des incendies, des sécheresses, des inondations et d’autres catastrophes naturelles mettra encore plus à l’épreuve les agriculteurs.

«Il s’agit d’un problème structurel que nos gouvernements et nous, en tant que société, devons résoudre: la vie va devenir de plus en plus chère. Il faut donc trouver comment mieux partager», a-t-il soutenu.

«Pas seulement par l’entraide et le soutien des quartiers, mais aussi par la politique gouvernementale», qui, selon M. Andrée, devrait inclure un revenu universel ou une augmentation des montants d’aide sociale pour garantir que les gens aient l’argent dont ils ont besoin pour survivre.

Des initiatives individuelles

À Moncton, au Nouveau-Brunswick, Heddy May a relaté qu’elle avait voulu faire quelque chose pour aider ses voisins après avoir constaté une augmentation du nombre de messages dans un groupe Facebook de la région de Moncton provenant de familles à la recherche de dons de nourriture. Mme May est tombée sur une initiative appelée Little Free Pantry, qui propose des ressources en ligne sur la façon de gérer avec succès un garde-manger communautaire, et a décidé d’en installer un sur sa pelouse.

Pour Noël, Mme May a demandé à sa famille un garde-manger qu’elle pourrait stocker et entretenir devant sa maison. «C’est certainement le plus beau cadeau que j’ai reçu cette année», a-t-elle souligné en riant.

Son père lui a construit un garde-manger en bois avec des portes vitrées qui est surélevé du sol sur trois pieds de table. Le placard contient des dons de nourriture comme du beurre d’arachides, des boîtes de thon, du pain, du lait maternisé et des repas de riz instantanés. 

Mme May a déclaré qu’elle essayait de s’assurer que le garde-manger contienne également des produits de base comme des tampons, du papier de toilette et des couches.

Des complications possibles

Chris Pellerin, directeur intérimaire de la banque alimentaire Second Mile à Moncton, dit avoir constaté une augmentation du nombre de garde-manger communautaires et du nombre de personnes ayant besoin de nourriture.

M. Pellerin a indiqué qu’à mesure que la demande de nourriture augmente, les garde-manger communautaires «vont inévitablement arriver» alors que les gens essaient d’aider leurs voisins à se nourrir. Il dit que Second Mile a parrainé quelques garde-manger locaux, mais il admet que cela pourrait entraîner des «complications».

«Il faut penser aux rongeurs, aux souris et aux écureuils, ainsi qu’au froid de l’hiver canadien», a-t-il avancé lors d’une récente entrevue.

«Certaines choses ne peuvent pas être mises dehors, ne peuvent pas être mangées si elles gèlent. Il est donc très important que ces choses soient bien protégées.»

M. Andrée estime qu’il est important que les personnes qui lancent des projets d’entraide comme des garde-manger communautaires, des réfrigérateurs et d’autres programmes de centres alimentaires fassent également pression pour obtenir un soutien gouvernemental accru.

«Il s’agit de dire: « Nous allons faire ce que nous pouvons et nous allons plaider pour que le gouvernement fasse également sa part. »»