Les Français de Montréal sont nombreux à aller voter malgré la météo

MONTRÉAL — La file de citoyens français venus voter ce samedi au premier tour de l’élection présidentielle s’enroulait plusieurs fois autour du Palais des Congrès, avant même d’entrer dans l’immeuble.

À 11h, le compte Twitter du consulat français de Montréal annonçait un temps d’attente de 1h45. Mais les Français rencontrés dans la foule étaient plusieurs à dire avoir déjà dépassé ce temps, en ligne sous la bruine et le temps gris. Nombreux étaient ceux qui jugeaient qu’il leur faudrait 3 ou 4 heures avant d’accéder aux urnes.

Selon le sondage Ipsos-Sopra Steria sorti vendredi, le président sortant Emmanuel Macron est en tête avec 26,5 % des intentions de vote. Il a cependant perdu des plumes depuis le lancement des élections, où il prévoyait compter sur plus de 30 % des voix. Sa principale adversaire et cheffe du parti d’extrême droite, le Rassemblement national, Marine Le Pen, s’est tranquillement hissée jusqu’à 23 %. La différence entre les deux favoris se situe à l’intérieur de la marge d’erreur.

Le candidat de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon a lui aussi vu son soutien grimper durant la campagne, arrivant vendredi à 16,5 %, devant le polémiste d’extrême droite Eric Zemmour (9 %).

Vote stratégique

La grande majorité des personnes interviewées ont exprimé peu d’enthousiasme pour leur candidat choisi.

«On vote par dépit et non par conviction», a affirmé Frédérique, alors qu’il attendait en ligne. Arrivé au Québec il y a un an et demi, il a dit avoir «bougé justement à cause de ça, parce que j’avais marre de tourner en rond.»

À côté de lui, Marie s’est résignée à voter pour M. Mélenchon. «Je vais le dire très clairement, il y a beaucoup de choses qui me déplaisent chez Mélenchon», a-t-elle déclaré. Mais alors que tous les autres candidats de gauche traînent dans les sondages, «on espère qu’en faisant un gros score à gauche on mette des sujets de gauche dans les débats, parce que si c’est Le Pen et Macron au deuxième tour, on ne parlera pas d’écologie, on ne parlera pas de violence faite aux femmes».

Plus loin dans la queue, Yasmine votera elle aussi pour la première fois depuis son arrivée à Montréal, il y a trois ans.

«J’ai l’impression que c’est vraiment un schéma qui se répète toujours en France, a-t-elle lancé. C’est toujours un mélange entre les socialistes contre le centre-droite, la droite contre le centre-droite, on se rend compte qu’on vote toujours pour le moins mauvais, dans le fond.»

Son vote stratégique, elle le donnera cette année à M. Macron.

Dans une autre section de la file, M. Boisson est catégorique: «On veut dégager Macron et c’est tout. C’est un nul.» Il a fait référence à certaines des polémiques qui ont entaché le quinquennat du président sortant, notamment ses liens avec le cabinet de conseil McKinsey.

Il n’a pas souhaité révéler son vote, craignant la désapprobation.

Jo, elle, est venue avec une pancarte où on voit M. Macron vêtu d’un gilet jaune et avec une main et un œil manquants, en référence aux blessures reçues par des manifestants qui s’indignaient contre la hausse du coût de la vie.

Plusieurs personnes s’arrêtaient pour parler à Jo ou prendre des photos.

«Il est en train de casser toutes les institutions publiques qui sont là pour les Français», a fait valoir celle qui votera pour M. Mélenchon. «On ne veut pas un pays néolibéral où tout est payant, où tu peux crever dans la rue parce que tu n’as pas d’argent pour l’hôpital.»

Vers un jour de la marmotte?

En France, les citoyens votent directement pour un président, en plus de voter pour les députés. Cette année, une douzaine de candidats tentent leur chance. Si aucun d’entre eux ne remporte une majorité de voix, un deuxième scrutin aura lieu entre les deux favoris du premier tour.

Aux élections de 2017, M. Macron était sorti vainqueur du deuxième tour avec les deux tiers des voix, contre Mme Le Pen.

Alors que ces deux mêmes politiciens sont en tête des derniers sondages, plusieurs Français anticipent un scénario semblable.

«Pour faire un parallèle avec les élections canadiennes qui ont eu lieu récemment, ça risque de ressembler à la même chose, le résultat risque d’être identique à celui de la dernière fois», a jugé un homme d’âge moyen qui ne s’est pas identifié. «Ceci étant dit, on ne sait jamais, c’est pour ça qu’il faut exercer son droit de vote.»

Au Canada, le vote tire plus à gauche que sur le sol français. Au premier tour de 2017, Mme Le Pen avait gagné 21 % des appuis totaux, mais seulement 7 % chez les expatriés canadiens. De la même manière, le 20 % général de M. Mélenchon était moindre que son 27 % canadien.

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Cet article a été produit avec le soutien financier des Bourses Meta et La Presse Canadienne pour les nouvelles.