Le couple endeuillé accepte le remboursement de la CAQ

QUÉBEC — Un couple endeuillé qui a dû verser 200 $ à la Coalition avenir Québec (CAQ) pour rencontrer la ministre Geneviève Guilbault dans son combat contre l’alcool au volant a accepté le remboursement du parti.  

Embourbé dans une autre controverse concernant ses collectes de fonds, le parti de François Legault avait offert vendredi matin à Antoine Bittar et Élizabeth Rivera de les rembourser après qu’ils ont dénoncé cette situation jeudi après-midi. 

La directrice générale de la CAQ, Brigitte Legault, a indiqué vendredi matin dans un message texte que le parti avait offert un remboursement au couple et que la CAQ allait respecter son choix quel qu’il soit.

«M. Bittar et Mme Riviera ont accepté notre proposition de remboursement, a écrit Mme Legault dans un autre message transmis peu après midi. Le parti les remboursera directement. Ils sont ensuite libres d’effectuer un don personnel à l’organisme de leur choix.»

La Presse Canadienne a demandé une entrevue avec M. Bittar.

Antoine Bittar et Élizabeth Rivera sont en croisade pour faire baisser le taux d’alcoolémie permis dans le sang de 0,08 à 0,05 (50 mg d’alcool par 100 ml de sang) depuis la perte de leur fille en 2017, tuée par un conducteur ivre.

Jeudi, en commission parlementaire sur l’étude du projet de loi 48 relatif à la sécurité routière, Mme Rivera a révélé qu’un membre du personnel du bureau de la députée Marilyne Picard leur avait offert de rencontrer la ministre des Transports dans une activité de financement. 

Il fallait payer 100 $ par personne pour obtenir deux minutes par personne. Le couple a donc versé 200 $.

«Moi, je n’étais pas d’accord», avait admis Mme Rivera. 

«On a eu nos deux minutes et honnêtement, quand j’ai quitté l’endroit, j’étais vraiment déçue», a-t-elle poursuivi, tandis que son conjoint a dit: «Je ferais tout pour ma fille. Je n’ai pas le choix, sinon ça n’avance pas.»

Marilyne Picard a présenté ses excuses dans un message Facebook, tandis Mme Guilbault a dit être désolée et ne pas être au courant des détails de l’invitation, mais a accusé les partis d’opposition de faire de la récupération politique.  

«Il était indélicat de sa part de se porter à l’attaque, alors qu’elle aurait pu tout simplement exprimer ses excuses et sa bienveillance envers le couple visé», a déploré le député péquiste Joël Arseneau vendredi matin.

«Il y a eu des directives (à la CAQ), en quelque part, comme quoi il faut ramasser de l’argent», a dénoncé le député Andrés Fontecilla, de Québec solidaire (QS).

«En étant au gouvernement et en monnayant l’accès à des ministres, ça prend une autre allure, parce qu’au gouvernement on doit faire preuve d’une impartialité beaucoup, beaucoup plus grande.»

Le député libéral Monsef Derraji a déclaré qu’il était «inacceptable qu’on utilise la détresse d’un couple pour faire avancer la caisse électorale caquiste».

La CAQ est dans la tourmente depuis le 23 janvier dernier en raison de controverses sur ses méthodes de collectes de fonds.

La Presse Canadienne a révélé des messages de députés caquistes qui invitaient des élus municipaux à des cocktails de financement du parti en laissant entendre que ce serait une occasion pour faire avancer des dossiers.

Deux élus caquistes, Sylvain Lévesque et Louis-Charles Thouin, sont visés par une enquête de la commissaire à l’éthique de l’Assemblée nationale.

La Loi électorale prévoit que tout citoyen peut contribuer jusqu’à 100 $ par an à un parti politique, mais sans contrepartie.

La Presse Canadienne avait également appris que près de la moitié des maires, soit 503 sur 1138, ont contribué au financement de la CAQ depuis les élections municipales de 2021, pour un total de près de 100 000 $.

Le Soleil avait d’ailleurs révélé que Mme Guilbault et son collègue à l’Économie, Pierre Fitzgibbon, étaient de loin les ministres les plus populaires invités à des cocktails de financement caquistes: 16 participations fois en 16 mois. Incidemment ce sont deux ministères qui attribuent beaucoup de subventions, avait alors souligné le PQ.

Québec solidaire a accusé la CAQ d’avoir mis sur pied un «stratagème» de financement, tandis que le Parti québécois a évoqué une méthode «systémique» de financement.

Excédé, François Legault a qualifié jeudi les attaques de ses adversaires de «lançage de boue».