Guerre en Ukraine: répercussions sur la sécurité alimentaire mondiale, dit le PAM

OTTAWA — Le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations Unies prévient que des millions de personnes dans les pays en développement et les zones de conflit seront au bord de la famine en raison de l’invasion russe en Ukraine, l’un des plus grands pays exportateurs de blé au monde.

L’agence humanitaire demande donc au Canada et à d’autres grands exportateurs de blé d’ouvrir leurs silos pour combler de toute urgence la pénurie qui, selon le PAM, pourrait entraîner la famine de millions de personnes dans des pays, comme l’Éthiopie, le Yémen et le Soudan.

Le programme des Nations Unies et de nombreux pays en développement, dont le Liban et le Bangladesh, dépendent de l’Ukraine, connue sous le surnom de grenier de l’Europe, pour leur approvisionnement en blé.

Toutefois, la flambée du coût du grain et la perturbation des approvisionnements en provenance de l’Ukraine et de la Russie ont sonné l’alarme au sujet d’une crise alimentaire mondiale.

Vendredi, la ministre de l’Agricultureet de l’Agroalimentaire du Canada, Marie-Claude Bibeau, assistera à une réunion d’urgence avec ses homologues du G7 pour discuter des répercussions de l’invasion russe sur la sécurité alimentaire mondiale.

Mme Bibeau a déclaré que le Canada est conscient de la gravité de la situation, qu’il la surveille de près et souhaite apporter son aide.

«La chaîne d’approvisionnement mondiale du blé a été considérablement touchée par ce conflit», a reconnu la ministre dans un communiqué.

«Bien que le Canada, en tant que premier exportateur mondial de nombreux produits agroalimentaires clés, collabore avec ses alliés sur la façon dont il peut contribuer aux efforts, la production canadienne de blé a été considérablement réduite en raison de la sécheresse de l’an dernier et il n’y a pas une quantité importante de blé de disponible sur le marché avant la prochaine récolte», a-t-elle souligné.

Arif Husain, économiste en chef du Programme alimentaire mondial, a déclaré que l’organisation humanitaire elle-même s’était approvisionnée de 789 000 tonnes de blé en Ukraine l’an dernier

Il a précisé que 158 000 tonnes supplémentaires provenaient de la Russie et que l’organisation achète également du blé du Canada, l’un de ses plus grands bailleurs de fonds.

Il a demandé au Canada et aux autres exportateurs de céréales de combler le manque à gagner, soit en faisant des dons à partir de leurs stocks ou en vendant leurs approvisionnements à rabais aux organismes d’aide.

«Ça ne peut pas être pire», a affirmé M. Husain pour illustrer l’urgence de la situation.

«Il est primordial que les grands producteurs comme le Canada et l’Australie de bien vouloir fournir du blé aux organismes d’aide. Rien qu’au Yémen, cinq millions de personnes sont à deux doigts de la famine.»

Le prix du blé a fortement augmenté depuis le début de la guerre, ce qui le rend plus cher pour les pays en développement, les organismes d’aide et les autres importateurs.

Les compagnies maritimes qui transportent habituellement des céréales et de l’huile végétale de l’Ukraine et de la Russie sont aussi incapables d’approcher les ports en toute sécurité.

M. Husain a affirmé qu’ils ont également vu leurs coûts d’assurance et du carburant monter en flèche.

La hausse du prix du blé affectera également l’achat et la distribution aux populations pauvres et aux populations déplacées, qui comprennent maintenant les Ukrainiens.

Lors de sa visite à Londres lundi, le premier ministre Justin Trudeau a déclaré que l’invasion de l’Ukraine par la Russie avait un «effet d’enchaînement» dans le monde entier, y compris sur le Programme alimentaire mondial des Nations Unies.

La semaine dernière, Sandra McCardell, sous-ministre adjointe à Affaires mondiales Canada, a déclaré au Comité sénatorial des affaires étrangères que le gouvernement fédéral examinait l’éventualité d’une pénurie alimentaire.

«Il n’est pas question ici de seulement de l’Ukraine et de la Russie et nous devons absolument être prêts», avait-elle déclaré le 3 mars dernier.

Pour sa part, le directeur général d’une association de producteurs de grains de l’Ouest canadien, Dave Quist de la Western Canadian Wheat Growers Association, doute que les agriculteurs ukrainiens puissent mettre en terre leurs semences à temps afin d’être en mesure de récolter dans les champs en août et en septembre.

Il a par ailleurs souligné que de nombreux agriculteurs canadiens avaient déjà apporté leurs semences pour produire d’autres cultures ce printemps et qu’il était donc difficile pour eux de semer du blé à si court préavis.