Des entreprises ciblées pour leur prise de position dans le conflit Israël-Hamas

TORONTO — Les entreprises sont de plus en plus surveillées quant à leur position dans le conflit Israël-Hamas, alors que les manifestants réclament la paix.

De nombreuses marques internationales, dont McDonald’s, Starbucks et Disney, ont été la cible de boycottages, tandis qu’au Canada, la Banque Scotia en particulier a été la cible des manifestants pour avoir investi dans l’entreprise de défense israélienne Elbit Systems.

Avec une telle polarisation autour du conflit, les experts affirment que les entreprises doivent être particulièrement prudentes dans leurs actions, y compris dans la façon dont elles répondent aux critiques.

Les consommateurs réagissent généralement davantage aux perceptions négatives qu’ils ont des entreprises qu’aux perceptions positives, a déclaré Saeid Kermani, professeur adjoint de marketing à l’Université Trent.

Non seulement les perceptions négatives persistent, mais elles sont partagées en ligne plus rapidement et plus largement, et impliquent davantage de personnes, a-t-il ajouté.

Critiquer les entreprises peut également être efficace pour attirer l’attention sur un problème, a déclaré M. Kermani.

«Une partie de l’activisme que nous constatons, ou les réactions négatives que nous constatons, donnent l’impression que les marques sont des cibles faciles dans beaucoup de ces situations», a-t-il indiqué.

Une trêve temporaire entre Israël et le Hamas sera prolongée de deux jours supplémentaires, a annoncé lundi le ministère des Affaires étrangères du Qatar, dernier jour d’une trêve de quatre jours entre les belligérants.

Réactions

Les entreprises ont été confrontées à des réactions négatives en raison de différents niveaux d’implication ou de soutien perçus.

Il y a une semaine, la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN) a été confrontée à un blocus de plusieurs heures à Winnipeg par des manifestants réclamant un cessez-le-feu, affirmant qu’ils ciblaient l’entreprise en partie parce qu’elle avait un partenariat avec la compagnie de transport de marchandises israélienne ZIM.

Disney a fait face à des appels au boycottage après avoir condamné l’attaque terroriste du Hamas et promis de donner 2 millions de dollars aux organisations d’aide humanitaire dans cette région du globe.

De nombreuses entreprises ont choisi de garder le silence, mais plus de 200 grandes entreprises ont condamné l’attaque terroriste initiale du Hamas, selon une liste tenue par le professeur Jeffrey Sonnenfeld de l’Université de Yale.

La liste comprend plusieurs banques canadiennes qui ont publié des déclarations contre la violence.

«Nous sommes horrifiés par les meurtres et la mort de civils et de familles. Nous devons nous unir dans notre espoir commun de paix, de guérison et de fin de la violence dans la région», a déclaré Dave McKay, chef de la direction de RBC, dans un communiqué le 12 octobre.

La banque a annoncé un don de 250 000 $, qui sera réparti entre le Fonds de secours : Crise humanitaire au Moyen‑Orient de la Croix-Rouge canadienne et l’«United Jewish Appeal». D’autres banques ont également fait des dons similaires, notamment la Banque Scotia.

«Ces attaques violentes sont inadmissibles et vont à l’encontre de ce que nous valorisons en tant que société : la capacité de vivre en paix et en sécurité, dans le respect les uns des autres», a déclaré Scott Thomson, directeur général de la Banque Scotia.

Cohérence des valeurs et des actions

Les entreprises devraient se prononcer sur des enjeux lorsqu’ils sont liés à leurs valeurs ou à leurs missions fondamentales, a déclaré Paul Dunn, professeur d’éthique des affaires à la Goodman School of Business de l’Université Brock.

«Si une entreprise publie une déclaration de principe, alors elle est éthiquement obligée de respecter ces valeurs, sinon elle semble simplement hypocrite» a-t-il mentionné.

Les valeurs d’entreprise ont généralement une portée large, utilisant des mots tels que respect, intégrité et responsabilité, de sorte qu’il y a peu de limites aux questions que celles-ci peuvent commenter.

Alors que la réponse israélienne à l’attaque s’intensifiait, les entreprises ayant des liens ont fait l’objet de plus d’attention et en ont moins parlé.

Des manifestants ont investi la cérémonie de remise du Prix Scotiabank Giller le 13 novembre en brandissant des pancartes soutenant que «la Banque Scotia finance le génocide», puis quelques jours plus tard, des manifestants pro-palestiniens ont organisé un sit-in au siège social de la banque à Toronto.

La Banque Scotia n’a pas commenté publiquement les protestations, mais a noté que les investissements dans Elbit Systems par ses gestionnaires de portefeuille de 1832 Asset Management sont effectués indépendamment de la banque, à moins qu’il n’existe des politiques d’investissement spécifiques qui restreignent ces décisions.

Dans une note interne adressée au personnel, M. Thomson a mis l’accent sur les mesures de soutien au personnel, tout en soulignant le caractère indirect de l’investissement.

«Je comprends et respecte le fait que les employés de la banque ont des opinions très diverses sur le conflit en cours, et je sais que nous sommes tous d’accord sur le fait que la haine et la discrimination n’ont pas leur place dans notre banque. Mon intention avec ce message est de fournir le contexte et les faits entourant ces manifestations afin de contribuer à apporter une certaine clarté en ces temps particulièrement difficiles», a-t-il écrit.

M. Kermani a indiqué qu’on s’attend de plus en plus ces dernières années à ce que les entreprises interviennent sur des enjeux, car les gens les considèrent davantage comme des institutions sociales et culturelles, mais il existe également des preuves d’un déclin de cet appétit.

Les recherches indiquent également que les grandes entreprises ayant une clientèle diversifiée courent beaucoup plus de risques en s’exprimant qu’en ne disant rien.

«Vous n’allez pas vraiment en tirer profit, vous pourriez en fait finir par perdre beaucoup plus de clients», a-t-il avancé.