Bouazzi: une «rage» qui est «indigne d’un élu», juge un organisme juif

QUÉBEC — Un organisme représentant la communauté juive a jugé «indigne d’un élu» la «rage» du député Haroun Bouazzi, de Québec solidaire (QS), qui laisse entendre que le gouvernement caquiste est complice d’Israël dans des crimes de guerre, des crimes contre l’Humanité et un nettoyage ethnique.

M. Bouazzi a refusé de s’expliquer devant les journalistes sur ses déclarations mardi à l’Assemblée nationale, mais il a affirmé en fin de journée que son message aurait «pu être mieux formulé». Son chef parlementaire, Gabriel Nadeau-Dubois, a dit qu’il était d’accord «sur le fond» avec lui. 

Le Centre consultatif des relations juives et israéliennes a cependant ajouté sa voix au B’nai Brith pour condamner de façon lapidaire ces propos.

«Le (message) n’aurait pas pu être mieux formulé car sa prémisse était ancrée dans la haine», a publié le Centre sur le réseau social X.

«Ce genre d’attention disproportionnée et de rage envers le seul État juif du monde est indigne d’un élu et devrait alarmer tous les Québécois de bonne conscience qui rejettent la montée de l’antisémitisme.»

Le B’nai Brith a quant à lui estimé que M. Bouazzi incitait à la haine. 

À l’origine de cette controverse: dans son message controversé jeudi dernier, le député de QS affirmait qu’en ouvrant un Bureau du Québec pour faire des affaires en Israël, la Coalition avenir Québec (CAQ) «nous rend complices d’un gouvernement d’extrême droite qui accumule les crimes de guerre, les crimes contre l’Humanité, les nettoyages ethniques et qui a démarré un processus génocidaire depuis quelques mois».

Mardi après-midi en Chambre, la ministre de l’Enseignement supérieur, Pascale Déry, a déposé une motion où l’Assemblée nationale se dissociait de tout propos insinuant que le gouvernement du Québec est complice de «crime contre l’Humanité, de nettoyage ethnique et de génocide».

Mais QS a choisi de défendre son député: le leader parlementaire de QS, Alexandre Leduc, a refusé d’accorder son consentement pour en débattre. 

L’organisme B’nai Brith, qui défend la communauté juive au Québec, a associé la déclaration de M. Bouazzi à de l’incitation à la haine et a demandé mardi au député de la retirer.

«Non, ce n’est pas de l’incitation à la haine», a répondu le chef parlementaire de QS, Gabriel Nadeau-Dubois, en ajoutant qu’il est d’accord sur le fond avec son député.  

«Je n’ai pas de problème à concéder que le tweet était, un peu intense», a-t-il affirmé en mêlée de presse.  

«Sur le fond, on dit tous la même chose, ça envoie un très mauvais message. Ça envoie le message que le gouvernement du Québec est à l’aise de faire des affaires avec un gouvernement qui est rempli de ministres d’extrême droite.»

«C’est vrai que mon tweet de jeudi aurait pu être mieux formulé, a commenté M. Bouazzi sur X. Mais je sais que nous sommes toutes et tous d’accord sur l’essentiel: ouvrir un bureau du Québec à Tel-Aviv est un acte diplomatique qui envoie un très mauvais message. Or, en pleine guerre, cet acte diplomatique constitue une faute politique grave.»

«Tout ce que ça fait, c’est d’alimenter l’incitation à la haine envers la population juive du Québec et c’est dangereux, ça ne devrait pas être lancé dans la sphère publique, surtout quand quelqu’un est un élu, un député, a déclaré le directeur régional Québec de B’nai Brith, Henry Topas, dans une entrevue avec La Presse Canadienne diffusée mardi. Ce n’est pas sage.»

Car la population observe les élus et retient des leçons sur les façons de se comporter et sur ce qui peut être dit, a noté M. Topas. Les députés doivent donc agir de façon responsable.    

Le porte-parole de B’nai Brith ne considère pas toutefois que les propos sont antisémites et ne demande pas d’excuses. 

En conférence de presse sur un autre enjeu à l’Assemblée nationale en après-midi, M. Bouazzi a refusé de répondre. 

L’attaché de presse de QS a argué qu’il manquait de temps dans la conférence de presse qui portait sur les rentes des personnes invalides, alors que les allocutions d’ouverture avaient duré plus de 25 minutes et qu’il n’y avait que deux journalistes à la conférence de presse. 

«Pour le respect de toutes ces personnes qui se battent depuis 25 ans, c’est leur journée à eux, on va vous inviter à rester sur le sujet», a dit M. Bouazzi. 

«Quand j’ai vu de tels propos, je trouvais que ça dépassait les bornes, que ça dépassait les limites, que c’était injustifiable, mais je vais laisser Québec solidaire se gouverner», a dit le chef intérimaire de l’opposition libérale, Marc Tanguay, dont les députés représentent notamment une bonne partie de la communauté juive à Montréal.