Gardienne de la mémoire du métal québécois

MUSIQUE.  Jonglant entre son travail au SANA de la MRC de Maskinongé, son rôle de maman et les spectacles de son groupe Hands Of Death (HOD), Louise Girard consacre le peu de temps qui lui reste à la rédaction du tome 2 de l’histoire de la musique heavy métal au Québec

Fan absolu de ce genre musical depuis la première écoute de And Justice For All de Metallica en 1989, la résidente de Saint-Justin a hérité du mandat de poursuivre le travail initié par Félix B. Desfossés, auteur du livre L’évolution du métal québécois No Speed Limit (1964-1989) publié en 2014.

Attablée avec ses cartables remplis de billets de concerts, de revues spécialisées, de découpures de journaux, de flyers annonçant des spectacles, Louise Girard est une véritable encyclopédie vivante de l’histoire du métal au Québec. « J’ai tout conservé. J’ai même encore ma cassette de Metallica que ma mère m’avait achetée en me demandant si j’étais sûr que j’allais aimer ça », raconte en riant celle qui habite en Mauricie depuis près de 15 ans.

Le tome II couvrira de 1989 à 1997, une période où Louise Girard s’abreuvait à toutes les sources. « Dans le temps, Musique Plus jouait un rôle important pour faire connaître les groupes québécois qui faisaient peu de vidéos. Les animateurs allaient les interviewer dans leur local de pratique pour annoncer leurs concerts », se souvient-elle.

Les radios universitaires et communautaires ont aussi contribué à faire découvrir cette musique underground en lui réservant des émissions dans leur programmation. Le magasin de disques Rock en Stock, sur la rue Crescent à Montréal, était un incontournable pour découvrir les groupes québécois de l’époque. « Il y avait un étage au complet réservé au métal. Le commis René, qui savait que je tripais sur Obituary, m’avait recommandé Gorguts. J’avais capoté », sourit Louise Girard.

Du métal en français?

DBC (Dead Brain Cells), Sword, Obliveon – qu’elle a vu en spectacle dans un gymnase d’école lorsque le groupe débutait – ne sont quelques formations qui ont marqué la scène québécoise métal de l’époque. Chantant majoritairement en anglais, une poignée de groupes se distinguaient avec des paroles en français comme FLH, Démence ou Anonymus. « C’était le fun parce qu’on pouvait chanter les refrains, pas juste les baragouiner. Ça te donnait un sentiment d’appartenance encore plus fort. »

Pour Louise Girard, la musique métal au Québec s’inspirait évidemment de ce qui se faisait aux États-Unis et en Europe, mais l’inverse était aussi vrai. « On sait tous que Voïvod a influencé des groupes à l’international, mais c’est aussi le cas de Dead Brains Cells et Obliveon qui produisaient du matériel très original. Plusieurs de nos musiciens étaient des virtuoses, très solides techniquement », rappelle-t-elle.

La Mauricie est également une région avec une scène musicale heavy métal très dynamique dit-elle. Des groupes comme Genetic Error, fondé dans les années 1980 et qui joue encore aujourd’hui, Martyr, Strigampire, qui a participé à un festival en Allemagne l’an dernier,  témoignent tous de cette vitalité.

La résidente de Saint-Justin a décidé de circonscrire son travail jusqu’en 1997 parce que cette année-là correspond à l’arrivée d’un nouveau courant venu d’Europe, plus mélodique et chanté, dans la musique métal.  Il y a également le fait que de 1998 à 2005, Louise Girard écrit des articles et coordonne la revue de métal québécoise Sang Frais.

« On parlait des groupes locaux, mais aussi de ceux d’ailleurs qui venaient présenter des spectacles au Québec. À partir de ce moment, je n’étais plus juste une fan dans la foule, mais j’étais dans l’arrière-scène. J’ai moins d’objectivité pour parler de cette période », termine Louise Girard qui prévoit terminer le manuscrit de son livre au cours de l’année 2024 en vue d’une publication l’an prochain.

Soulignons que l’auteure a reçu un soutien financier de 11 000$ du Conseil des arts et des lettres du Québec pour la rédaction de son livre.  

Fan et chanteuse

La résidente de Saint-Justin n’est pas seulement une fan de heavy metal, elle est également la chanteuse de Hands of Death (HOD), un groupe de metalcore avec deux CD à son actif. Fondée au début des années 2000, la formation avait pris une pause en 2011. « J’ai fait mon dernier spectacle en août 2011 et j’accouchais en septembre », souligne-t-elle en souriant. HOD a cependant repris la route en 2023 et des spectacles sont au programme cette année.

Parallèlement, Louise Girard participera ce vendredi 8 mars au dévoilement à Montréal d’un site web consacré aux femmes qui ont fait leur marque dans la musique heavy metal. « Je vais faire un petit historique de leur place dans l’évolution de la musique métal. On pourrait dire que les femmes ont toujours été marginales dans un courant musical qui était lui-même marginal. Mais heureusement, comme dans la société en général, les choses ont évolué et on retrouve beaucoup plus de femmes aujourd’hui que lorsque j’ai commencé à suivre ça. »