Une auteure française débarque à Louiseville avec sa vie en bordel

Marie-Geraldine Perrin est une dame très peu banale, elle tient les rênes d’une vie qui l’est encore moins, alors imaginez son livre. La mère de cinq enfants (en 1998) a multiplié les efforts pour offrir à sa progéniture ce dont elle avait besoin afin de gravir les échelons d’une vie normale en France. Pendant ce temps, elle se laissait emporter par la romance d’un homme marié.

C’est bercée entre la culpabilité d’arracher un époux à sa femme et ses fondements carpe diem qu’elle a finalement accepté de vivre un séjour romantique avec son amant, en même temps que la coupe du monde de soccer de 1998.

Quelques années après la lune de miel éphémère, elle apprend qu’elle est affligée du cancer. Pendant sa convalescence, elle écrit l’histoire de son voyage d’amour en partageant ses pensées profondes. Son livre Rouge bordeaux est le véritable cri du cœur d’une femme moderne.

Entre deux traitements, de son hôpital, elle fait la connaissance d’un Québécois sur Internet. Le coup de foudre est réel, si bien qu’une fois sur pied, elle quitte sa vie pour la belle province. Rouge bordeaux est finalement publié au mois de mars de cette année.

Dans l’attente d’un visa de travail, elle s’est déjà trouvé un emploi qu’elle a hâte d’exercer, entre l’écriture de son prochain livre et les soirées d’amour avec sa nouvelle flamme.

Dans deux semaines, il y aura exactement cinq ans qu’elle amorçait la rémission de son cancer, période nécessaire afin de parler d’une guérison franche.

Enfin, le journaliste du média local accepte de la rencontrer pour qu’elle puisse faire la promotion de son premier roman.

«Demain je saurai si j’ai le cancer, mais aujourd’hui c’est une belle journée», dit-elle en commençant l’entrevue.

Habillée soigneusement, la tête haute, elle parle de son roman et de sa vie, les deux s’entrecoupent et forment une saga en soi. Cette femme confrontée à la fatalité discute sans gêne des méandres qui l’ont menée au Québec. De son prochain livre qui fera état des caprices de la vie à son égard et de ce qu’elle veut que l’on retienne d’elle.

«Après ma mort, si j’étais au milieu des vivants, dans mon cercueil, je dirais à chacun de penser qu’il est quelqu’un de très bien. On juge trop les autres et on se culpabilise beaucoup trop, les gens seraient meilleurs s’ils pensaient des autres et d’eux-mêmes qu’ils sont meilleurs.

«Le moment présent s’inscrit dans l’éternité, il faut savourer la vie et ne pas la gaspiller comme on le fait avec un vieux kleenex. Il faut jouir du moment présent, mais penser au futur. Plusieurs personnes ont construit la cathédrale Notre-Dame, en sachant qu’elles ne verraient jamais le résultat final. Elles l’ont fait en pensant aux générations futures. Il faut qu’on profite de la vie en pensant aux autres.»

Problèmes avec l’immigration

D’un point de vue plus terre-à-terre, Marie-Géraldine espère pouvoir rester et être soignée ici advenant une mauvaise nouvelle. «J’ai peur qu’on m’oblige à retourner en France. Ma vie est ici maintenant.»

Marie-Géraldine se plait dans les campagnes de la MRC de Maskinongé, elle décrit le Québec comme étant un havre:

«Les paysages sont ravissants, mais je retiens particulièrement les odeurs. Chaque période de la journée a son odeur à Louiseville. Le matin on sent les montagnes, le midi ce sont les fleurs et le soir quand je me balade en moto, c’est l’odeur de la terre chaude qui m’inspire. Les Québécois sont des gens très évolués. Ici, les choses de la vie sont dites avec simplicité. On en parle plus franchement, les Français, eux, sont plus coincés.»

Rapidement, la romancière fait des rencontres marquantes.

«Il y a tellement de gens qui m’ont aidée depuis mon arrivée. Le Bed and Breakfast des Beauregard, le thanatologue, même le maire, M. Richard s’est montré très gentil. Il m’a dit: ‘‘Si vous aimez Louiseville, Louiseville vous aime.’’ Puis il y a Sonia qui est rapidement devenue une grande amie, il faut en parler dans votre article.»

Marie-Géraldine et St-Antoine

À son arrivée, le Père Jean-Pierre Guillemette, célébrant à l’église St-Antoine, a été l’un des premiers à entrer en contact avec la Française.

«St-Antoine est devenu très significatif pour moi, explique Marie-Géraldine Perrin. Le Père Guillemette m’a raconté une histoire le concernant: une femme frustrée de ne pas avoir trouvé d’amoureux a perdu la foi et a lancé par-dessus bord la statue de St-Antoine. Celle-ci a heurté un homme qui passait en bas. Vous devinez la suite, le passant allait épouser plus tard la dame qui croyait finir ses jours célibataire. Ce qui est le plus extraordinaire avec cette histoire, c’est que la fête de St-Antoine est célébrée le 13 juin et c’est précisément à cette date que j’ai rencontré mon amoureux québécois.»

Rouge bordeaux est publié aux éditions société des écrivains, disponible sur Internet.

Voir la critique littéraire de Diane Béland