Pêche à la perchaude: le moratoire est maintenu

La nouvelle est tombée comme une tonne de briques pour l’Aire faunique communautaire (AFC) du lac Saint-Pierre qui a appris jeudi que le moratoire sur la pêche à la perchaude était maintenu sur le lac Saint-Pierre.

« On a appris la fin du monde une journée avant tout le monde », balance le président de l’AFC, Stéphane Marin.

Le ministre du Développement durable, de l’Environnement, de la Faune et des Parcs, Yves-François Blanchet, a expliqué à l’association que sa principale préoccupation était de préserver la ressource. Il soutient que les populations de perchaudes sont dans un état critique dans ce plan d’eau.

« Si on ouvre la pêche à la perchaude, les chances pour que les populations de perchaudes se rétablissent sont très minces. Si on ne fait pas ce qu’on fait maintenant, c’est terminé pour la perchaude (dans le lac Saint-Pierre) », avise-t-il.

Le ministre poursuit en pointant les facteurs qui motivent sa décision.

Selon les études sur lesquelles se sont basées le gouvernement, le rétablissement de la perchaude dans le lac est limité par la détérioration des habitats de reproduction, de croissance et d’alimentation et sa zone littorale, l’arrivée de nouveaux prédateurs comme le cormoran à aigrettes et celle de compétiteurs tel le gobie à taches noires.

Par ailleurs, le ministère a décidé de maintenir les essais de contrôle par abattage du cormoran réalisés à l’été 2012.

« Je partage l’inquiétude des pourvoyeurs et des pêcheurs, mais nous devons nous rendre à l’évidence. Seul un ensemble de mesures sévères de protection et de restauration donnera une chance, même incertaine, de relancer cette activité à moyen terme », explique-t-il. Le ministre présentera aux acteurs locaux et régionaux une démarche dès le début de l’année 2013 afin d’agir sur les écosystèmes du lac Saint-Pierre, prioritairement sur l’habitat de la perchaude. Cinq ministères participeront à cette action gouvernementale.

« Il ne s’agit plus seulement de permettre ou non la pêche, mais bien de faire reconnaître qu’en vertu des principes du développement durable et de la préservation des espèces, c’est l’ensemble des écosystèmes du lac Saint-Pierre qui doivent être l’objet d’une réflexion et d’une série de mesures vigoureuses. Le lac Saint-Pierre est un bijou géographique et écologique dont nous avons le devoir de rétablir l’équilibre et la vitalité », souligne-t-il.

L’AFC avait proposé au gouvernement un assouplissement du moratoire durant l’hiver, soit une limite de cinq perchaudes par quota de pêche. L’option n’a pas été retenue par Québec.

« Cette décision continuera d’affliger d’importantes conséquences économiques, touristiques et affectera grandement l’effort de la relève au lac Saint-Pierre », commente le directeur général de l’AFC, Alexandre St-Yves.

« C’est aberrant, il se pêche entre 12 et 14 tonnes au pied du pont Laviolette et la pêche commerciale est permise là-bas. C’est encore les pêcheurs sportifs qui écopent. Ils vont sauver 3 à 4 tonnes. C’est des conneries », fustige pour sa part M. Marin. Mentionnons que la pêche sportive est également permise à cet endroit, ce qui représente, selon lui, une incongruité, puisque les pêcheurs puisent directement dans les réserves de perchaudes du lac Saint-Pierre en aval du pont.

« Je n’annonce rien aujourd’hui, mais il est très possible que la pêche à la perchaude ne demeure pas permise à cet endroit. Ce ne serait pas logique », rétorque M. Blanchet.

Stéphane Marin refuse toutefois de rendre les armes et menace le gouvernement d’entamer des moyens de pression afin de faire lever le moratoire.

« Nous allons commencer par organiser une pétition, mais s’il faut sortir dans la rue avec des casseroles, c’est ce que nous ferons », conclut-il.

Rappelons qu‘un moratoire d’une durée de cinq ans avait été institué pour la sauvegarde de l’espèce le 4 mai dernier par le gouvernement libéral. Suite à cette décision, l’AFC a fait connaître son regret de n’avoir pas été consulté dans cette affaire, de manière à trouver une avenue possible pour continuer un minimum d’activités de pêche à la perchaude sur le lac. Les études se sont poursuivies pendant l’été et le cormoran à aigrettes a été identifié comme une espèce envahissante par des agents du ministère des Ressources naturelles et de la Faune. Ainsi, au cours de l’été, 650 cormorans ont été abattus et plusieurs oiseaux ont quitté leur nid. Cette mesure n’a pas convaincu l’état d’allouer la pêche sportive hivernale à la perchaude sur le lac St-Pierre.