«Pas besoin d’aller au Cap, nous on a la bonne femme!»

Janine Désaulniers est une encyclopédie vivante. Du haut de ses 87 ans, peu de détails se sont effacés de sa mémoire au fil du temps. Un de ses sujets préférés: les miracles de sainte Anne à Yamachiche. Elle a bien voulu rapporter des évènements «surnaturels» attribués à la dévotion de sainte Anne par les fervents de Yamachiche.

Elle se souvient entre autres d’avoir surpris une discussion qu’avaient eue ses parents en 1938. «Pas besoin d’aller au Cap-de-la-Madeleine pour voir la Sainte Vierge», avait dit son père à sa mère, pendant une journée de neuvaine. «Nous, on a la bonne femme!», avait-il ajouté. Cette formulation particulière peut paraître étrange, mais selon Janine Désaulniers, elle démontre au contraire la proximité et l’attachement des gens de Yamachiche à la grand-mère de Jésus. La sainte patronne aurait en effet sauvé le village à deux reprises d’une fièvre maléfique, en 1855 et en 1863. Plusieurs témoignages rapportent des guérisons miraculeuses associées au culte de sainte Anne à cette époque.

«Dans ma famille Désaulniers, plusieurs ont péri de la fièvre, mais d’autres ont eu plus de chance», affirme-t-elle.

Les interventions divines sont mêmes relatées dans quelques livres dont Yamachiche et son histoire: 1672-1978, rédigé par J.-Alide Pellerin.

«On se souviendra longtemps à Yamachiche, de dire l’abbé Caron, de cette épidémie de fièvres typhoïdes qui a porté la désolation dans toute la paroisse, du 26 novembre 1855 au 15 février 1856. Des familles entières furent emportées par ce fléau, parce que les paroissiens ne pouvaient avoir recours à la médecine, dont les moyens étaient impuissants au milieu d’un pareil désastre. Ils s’adressèrent donc avec confiance à leur auguste patronne. Une foule recueillie et suppliante encombra l’église, et une grand’messe solennelle fut chantée en l’honneur de la bonne sainte Anne. Monsieur l’abbé Dorion, voyant l’affliction de son peuple , leva les mains vers sainte Anne, lui adressa une fervente prière. Pénétré d’une confiance inébranlable, il organisa une procession en portant lui-même la relique. L‘effet fut subit et saisissant: le fléau ne fit plus une seule victime», peut-on y lire.

Mme Désaulniers raconte aussi avoir assisté à une scène particulière où un certain Charles Lamy se plaignait, dans une discussion, n’avoir pas reçu de guérison malgré une foi inébranlable en sainte Anne. On lui aurait alors répondu de laisser tomber ses béquilles «pour le fun», ce qu’il aurait fait, surpris de voir qu’il marchait bien à nouveau.

En 1876, le culte avait atteint un tel paroxysme que lorsque la statue dégradée par le temps fut transportée au cimetière, les paroissiens découpaient des morceaux de statue pour les garder chez eux. L’imposante patronne de Yamachiche règne encore aujourd’hui en maître dans le cimetière. C’est à cet endroit que L’Écho a rencontré Janine Désaulniers.

«Les miracles non répertoriés sont innombrables», conclut la gentille dame, visiblement beaucoup trop en forme pour son âge, avant de partir au volant de son auto.

Sainte Anne est fêtée, à l’instar de son mari Joachim le 26 juillet de chaque année à travers le monde.

À Yamachiche, les célébrations de la grand-mère de Jésus ont habituellement lieu le samedi le plus près de cette date. Exceptionnellement cette année, la fête chrétienne a été devancée d’une semaine, pour les fervents de cette municipalité mauricienne.