Julien Godard émerge

Le décor était sobre, un tabouret, un verre d’eau, un micro et Julien Godard. Pas même trois années complétées au secondaire et déjà, le jeune humoriste nageait comme un poisson dans l’eau sur les planches, à l’occasion de la finale locale de Secondaire en spectacle, vendredi dernier. Il a partagé ses pensées, celles d’un adolescent, avec une maturité impressionnante, mais surtout avec un sens du punch troublant pour son âge. Pas surprenant que le jury en ait fait son premier choix pour représenter l’école secondaire l’Escale à la finale régionale.

Parlant de la finale régionale, la gagnante de l’an dernier était de retour cette année. Pour son chant du cygne, Marie-Ève Plante s’est payée la totale. Derrière son piano, la jeune diva balançait avec justesse les notes et les paroles qu’elle avait composées elle-même. L’auteure-compositrice-interprète d’une pièce intitulée «Reste» s’est emparée de l’ultime laissez-passer disponible qui lui permettra de défendre son titre.

«J’avais le goût de faire changement et de montrer une autre facette de moi, a-t-elle expliqué. J’interprète souvent et les gens me disent que je suis bonne, mais j’avais le goût que le monde me dise que je suis bonne pour mes chansons à moi. Ça sort de ma tête, ce sont mes émotions.»

«C’est la première à l’Escale qui accomplit l’exploit (de livrer une pièce de son propre cru)», a commenté l’enseignant responsable du spectacle, Serge Baril.

Dommage pour Joliane Plante. Son interprétation du classique «Un vieux dans le bas du fleuve» de Gaston Mandeville, à sa manière, lui aurait sans doute permis de passer au prochain niveau dans une école où le talent n’est pas aussi omniprésent.

Par ailleurs, les juges ont jeté leur dévolu sur Marie-Jades Lacroix, qu’ils ont élue coup de cœur de la soirée. La comédienne s’est lancée dans toute une aventure en menant de front l’incarnation de quatre personnages. Elle a livré un court récit écrit par Serge Baril : «Le TGTC».

Serge Baril, parce qu’il faut le mentionner, fait partie des gens qui pratiquent le «bon métier». L’ovation que les jeunes lui ont rendue relativement à l’organisation du spectacle est révélatrice.

L’enseignant a, d’autre part, donné un avant-goût du spectacle d’humour qu’il confectionne au profit d’Opération Enfant Soleil. Il a enfilé le costume burlesque de Gilles Latulipe et ça lui allait comme un gant, du bonbon.

Accompagné de Joanie Francoeur, ce même Serge Baril a préparé rigoureusement l’équipe d’animation, celle-ci a répondu avec tonus. On ne s’ennuyait pas entre les numéros.

Une soirée grandiose, certes, mais il y avait de petits irritants. Les élèves avaient carte blanche pour le choix de leur pièce, par contre, certains auraient dû demander conseil. Il n’était pas rare de voir un artiste en herbe doté d’une superbe voix, s’élancer dans une chanson qui ne convenait pas à son registre. Même l’excellente Marie-Ève Plante a bifurqué lorsqu’elle a interprété «Stronger» de Kelly Clarkson, dans un numéro hors-concours.

En terminant, soulignons quelques coups de cœur, puisque le jury était restreint à n’en donner qu’un seul et que plusieurs exhibitions sortaient de l’ordinaire :

«C’est ta dernière chance», une scène dramatique, traitant de la consommation de drogue et d’alcool a été brillamment jouée par Audréanne Noël, Olivier Noël, Alexandre Pratte, Gabrielle Robert et Dominic Flamand-Marion, le frère de l’auteur derrière le sketch, Marc-André Marion-Flamand. Ce dernier est un finissant de l’Escale qui a gravi les échelons en art dramatique.

«La vulgarisation vers le haut», une interprétation théâtrale de la troupe des Poêles à Bois, livrée avec la précision chirurgicale des Denis Drolet, mérite au moins un accessit et surtout un écho dans notre société qui perd à petit feu ses mots.

Si certaines interprétations ont écorché la langue de Shakespeare dans les numéros hors-concours, Élizabeth Landry et Joliane Plante pourraient endisquer demain matin. Leur présence sur scène et leur complicité dans la livraison de «We are never ever, getting back together», de Taylor Swift était digne de mention.

La finale régionale de secondaire en spectacle se déroulera sur deux soirs, les 7 et 8 avril prochain, à la Salle J-Antonio-Thompson de Trois-Rivières.