Itinérant pour une deuxième fois

COMMUNAUTÉ. Sans-abri durant son adolescence, Joe Roberts le redevient une trentaine d’années plus tard. Cette fois, par contre, il sait combien de temps il sera dans cette situation: durant 517 jours, le temps qu’il lui faudra pour traverser le Canada à pied.

L’homme d’affaires originaire de Barrie, en Ontario, effectue cette traversée en poussant un panier d’épicerie. Il souhaite sensibiliser la population à la problématique de l’itinérance. Il était de passage à Trois-Rivières vendredi et samedi, après 132 jours de marche.

«Le panier est un symbole. Il est associé aux sans-abris chroniques. Il y en a peut-être peu, ou pas du tout ici, à Trois-Rivières, et c’est justement là le défi. C’est difficile, dans pareil contexte, de faire prendre conscience aux gens que l’itinérance est présente. De leur faire réaliser qu’il y a, autour d’eux, des jeunes qui sont à risque de devenir des sans-abris chroniques. Ça fait peur. Il faut s’occuper de ces jeunes avant qu’ils en viennent à pousser un panier d’épicerie. Ça passe par de la prévention. C’est le message que je véhicule.»

Une adolescence difficile

Adolescent, Joe Roberts a fui la maison familiale, devenue un milieu de vie insoutenable pour lui. «Je viens d’une famille normale, de classe moyenne. Mon père est mort quand j’étais très jeune. Mon beau-père était alcoolique et abusif, je n’en pouvais plus de lui. J’ai quitté la maison à 15 ans.»

Perdu, à la recherche de repères, il a commencé à se droguer. «J’en ai été accro durant un certain nombre d’années. Mais j’ai réussi à m’en sortir parce que j’ai eu un bon support, de ma mère, notamment, et de ma communauté. Je suis retourné à l’école, j’ai intégré le monde des affaires en 1998 et j’ai démarré mon entreprise de conception de sites web. Elle a connu plus de succès qu’espéré.»

Mais l’argent, le succès et les prix, ce n’était pas pour lui, dit-il. En 2003, il a quitté le monde des affaires. «J’ai cette chance de pouvoir me permettre, financièrement, de faire ce que je veux. J’ai choisi de consacrer le reste de ma vie à essayer d’inspirer les gens en partageant mon histoire et en supportant les jeunes.»

La rue: dure pour le moral

L’itinérance, c’est dur. Pas juste à cause de la faim ou du froid, indique M. Roberts. «Le plus dur, c’est d’être ignoré. Les gens ne nous voient pas. Ils cessent de nous traiter comme des êtres humains. On est déconnecté du monde.»

Selon lui, le plus beau cadeau à faire à un itinérant, c’est de le voir. «Le fait d’engager une simple conversation avec lui peut faire toute une différence. Peu importe qui ils sont, ils ont chacun une histoire. Avec de l’empathie et de la compassion, on peut changer les choses.»

Le périple en bref

Joe Roberts prépare sa traversée du Canada depuis 2012. L’idée a germé en lui après avoir livré un témoignage percutant à Montréal. Il s’est dit que s’il avait réussi à changer la perception d’un groupe concernant l’itinérance, il pouvait changer celle d’un pays.

Sa traversée a débuté le 1er mai dernier à St-John’s (Terre-Neuve). Au terme de son périple, vers le 30 septembre 2017, M. Roberts aura marché environ 9000 kilomètres. Chaque jour, il parcourt environ 24 kilomètres.

Pour en savoir plus ou pour encourager sa cause, il suffit de visiter le site web suivant: The push for change | Agir pour le changement