Des élèves libres de tracas à Saint-Justin

ÉDUCATION. Les élèves de la classe de Madame Chantale (Savard) côtoieront cette année encore des amis à l’oreille attentive. Ours à Lunettes, Bubulle et Cocotte seront là pour les réconforter, les sécuriser et surtout, leur permettre d’évacuer les émotions qui perturbent leur journée. Ces trois amis, ce sont des peluches Mange-Tracas que les enfants peuvent câliner lorsqu’ils en ressentent le besoin.

Implantés l’an dernier en projet-pilote, ces trois sympathiques personnages ont fait de véritables petits miracles dans l’épanouissement des élèves de Madame Chantale, enseignante en première année à l’école primaire de Saint-Justin. Avec leur grande bouche dotée d’une fermeture-éclair, ils avalent au quotidien le négatif que leur dessinent ou leur écrivent les enfants. Et il y demeure!

Les enfants se libèrent ainsi de ce qui leur pèse sur le dos. Ce faisant, ils se positionnent dans un bien meilleur état d’esprit pour faire leurs apprentissages de la journée. Exit la colère, la tristesse, la peur, l’angoisse et tout autre sentiment envahissant engendré par une dispute, l’annonce d’une maladie, la perte d’un être cher, un examen à venir ou une responsabilité oubliée, par exemple! Une fois l’objet du tracas identifié, l’élève a deux choix: le confier à Bubulle ou Cocotte, qui garderont le secret, ou à Ours à Lunettes, qui demandera à l’enseignante d’aller en parler avec l’élève.  

Vivre ses émotions

Chantale Savard s’est toujours intéressée de près à ce que vivent ses élèves. Dans sa classe, tous les matins, les enfants remplissent un cahier d’émotions.  «J’ai toujours dit qu’un sentiment négatif, gardé à l’intérieur, affecte notre journée et nous empêche de nous concentrer. En en parlant, on se sent mieux. C’est la même chose pour les enfants. La différence, c’est qu’ils doivent apprendre à identifier l’émotion qu’ils vivent.»

Et l’une de ces émotions, c’est souvent l’anxiété. «C’est surprenant de constater à quel point les enfants peuvent en souffrir. Ça vient me chercher. C’est en cherchant un moyen de les apaiser que je suis tombée sur les "Avale-Souci" européens, importés ici sous le nom de "Mange-Tracas". Je me suis dit que ce pourrait être une belle option à explorer.»

Aussitôt dit, aussitôt fait: l’enseignante s’est dotée de ces adorables peluches, qu’elle a présentées à ses élèves. Un succès instantané!

«J’ai remarqué un changement significatif dans le comportement de certains élèves. Ça m’a rapprochée d’eux. Ils se sont ouverts à moi, ce qui m’a permis d’encore mieux les accompagner à travers une approche personnalisée.»

En effet, les Mange-Tracas ont parfois révélé des drames ou des difficultés insoupçonnés, permettant ainsi au professeur et à toute l’équipe de l’école d’intervenir de façon efficace selon la situation.

Boule de neige

L’initiative de Madame Chantale a tellement été couronnée de succès qu’elle fait aujourd’hui des petits. Un Mange-Tracas a vu le jour à l’école Rinfret de Sainte-Ursule grâce à l’implication de la technicienne en éducation spécialisée de l’école, Christine Landry, qui partage son temps entre les quatre écoles primaires du secteur de Saint-Justin, Sainte-Ursule et Maskinongé. «J’ai été séduite par l’impact du projet. C’est simple, mais tellement efficace!», témoigne-t-elle.

Elle a adapté le concept aux élèves plus vieux, qui peuvent jeter leur émotion négative dans une poubelle spéciale pour s’en débarrasser, ou la confier au Mange-Tracas de Madame Christine,  s’ils désirent en discuter avec elle. Là aussi, la magie opère.

«La portée de l’intervention est un peu moindre que du côté de Chantale vu que je ne suis pas à l’école à tous les jours, mais c’est quand même significatif. C’est certain que je vais continuer à utiliser ça comme moyen d’intervention dans le futur», dit-elle.

D’autres commissions scolaires ont approché Chantale Savard pour en savoir plus sur le projet. Il ne serait donc pas étonnant de voir des Mange-Tracas faire leur apparition dans plusieurs autres salles de classes du Québec dans un proche avenir.