De la cabane à sucre dans votre coupe à vin

AGROALIMENTAIRE.  Boisson alcoolisée s’inscrivant dans une tendance et au fort potentiel de développement, un vin et un mousseux à base de sève d’érable seront conçus dès cette année par La Ferme du Loup à Saint-Paulin. 

Propriétaires d’une érablière de 6000 entailles sur le chemin des Allumettes, Patrice Plouffe et Clara Bonnes  concoctaient déjà depuis une quinzaine d’années du vin d’érable pour leur propre consommation personnelle et pour offrir à la famille et aux amis. Encouragé par les bons commentaires reçus, le couple a décidé de commercialiser sa production en obtenant ce printemps un permis de la Régie des alcools, des courses et des jeux (RACJ).

« On prévoit une production d’environ 2000 bouteilles pour cette première année », souligne Patrice Plouffe, un professeur d’administration au Collège de Maisonneuve à Montréal qui possède un pied-à-terre à Saint-Étienne-des-Grès d’où sa mère est originaire.

Le vin d’érable – appelé aussi sével ou acer – est encore peu connu, mais ses origines remontent à une trentaine d’années au Québec. Il se prépare à partir d’une sève d’érable chauffée à 23 degrés Brix – environ le tiers de ce qu’il faut pour obtenir du sirop d’érable – qu’on fait ensuite fermenter. « On ajoute de la levure et on acidifie un peu le moult. Ce qui fait l’équilibre, c’est l’acide, le sucre et l’alcool. Ça prend beaucoup d’amour et de travail », révèle Patrice Plouffe en souriant.

Arborant la couleur d’un cognac, le vin d’érable de La Ferme du Loup pointe à 15% d’alcool et affiche au final une légère pointe sucrée évoquant subtilement ses origines. « Ça rappelle un peu le pineau des Charentes ou le porto. C’est idéal en apéro ou au dessert », poursuit l’acériculteur qui souligne que son sével se bonifie avec le temps. « J’ai encore des bouteilles de mes premières cuvées et il est juste meilleur. »

Un mousseux à l’érable?

Clara Bonnes et Patrice Plouffe ont aussi développé avec leur sève d’érable un vin mousseux naturel à 12% d’alcool. Ce PetNat – pour pétillant naturel – fermente avec une macération de fruits et de fleurs sauvages cueillis à même l’érablière. « Ce sont des baies d’aronia, un petit fruit peu sucré qui donne du tanin et du mélilot, une plante qui goûte la vanille », souligne Clara Bonnes qui en connaît déjà pas mal sur les secrets des mousseux puisque née dans la région de Champagne en France.

C’est cette macération de plantes et fruits sauvages qui vient donner la couleur et l’acidité au vin mousseux de La Ferme du Loup qui se distingue étonnamment par son goût sec et non sucré. Différente du procédé menant au champagne, le PetNat est une méthode ancestrale remise à la mode ces dernières années par les Français. Elle se distingue par la fermentation du vin qui se termine directement en bouteille, sans procédé de filtration, ni sulfites. « Ça s’inscrit dans la tendance des vins nature et des vins orange que les gens consomment ici depuis quelque temps. C’est des styles plus funkys et les Québécois sont maintenant plus ouverts à la découverte qu’ils ne l’étaient auparavant », estime Patrice Plouffe qui voit son PetNat comme un vin festif et simple, à consommer lors d’un pique-nique ou en apéro. « C’est un produit d’été alors que le sével est plus approprié en automne et en hiver. »

Un nouveau nom?

À peine plus d’une vingtaine d’acériculteurs au Québec détienne un permis de la RACJ pour produire sur une base commerciale de l’alcool à partir de leur eau d’érable et La Ferme du Loup est bien sûr le seul en Mauricie. Les Producteurs et productrices acéricoles du Québec (PPAQ) voit en tout cas tout le potentiel du produit pour l’avenir et le regroupement tenait récemment un panel avec les principaux concernés pour en discuter. « On regarde comment on pourrait faire mieux connaître le produit auprès des Québécois. Faudrait peut-être aussi lui donner un nom parce qu’un vin par définition, c’est fait à partir des raisins? », se questionne Patrice Plouffe qui est épaulé par un œnologue dans son projet.

La Ferme du Loup se distinguait déjà sur la scène provinciale avec ses produits à valeur ajoutée comme les sirops forestiers infusés au chaga (champignon) et aux conifères ainsi que pour son sirop d’érable fumé, mais voilà que la palette s’élargit avec ces deux nouveaux vins d’érable…