Trump a raison de croire qu’il vaudrait mieux traiter avec un libéral, dit Poilievre

OTTAWA — Alors que les sondages suggèrent que le président américain et le recours à des droits de douane punitifs par son administration constituent une préoccupation majeure pour les Canadiens à l’approche des prochaines élections fédérales, Donald Trump a maintenant fait part de ses réflexions sur le parti politique avec lequel il préférerait collaborer.

«Je préfère traiter avec un libéral qu’avec un conservateur», a indiqué M. Trump lors d’une entrevue accordée mardi à Laura Ingraham, animatrice de Fox News.

Au cours de l’entrevue, il a réitéré son appel à ce que le Canada devienne un État américain et sa fausse affirmation selon laquelle les États-Unis subventionnent le Canada à hauteur de 200 milliards $ US par an.

Il a également déclaré que le Canada était «l’un des pays les plus difficiles avec lequel traiter», citant ses relations avec le gouvernement de l’ancien premier ministre Justin Trudeau.

Lorsque Mme Ingraham a indiqué que le Parti libéral semblait susceptible de remporter les prochaines élections, le président a répondu: «Je m’en fiche, je m’en fiche, je m’en fiche.»

«Le conservateur qui se présente n’est, bêtement, pas mon ami. Je ne le connais pas, mais il a tenu des propos négatifs. Alors, quand il tient des propos négatifs, je m’en fiche complètement. Je pense qu’il est plus facile de traiter avec un libéral, en fait. Et peut-être qu’ils vont gagner, mais je m’en fiche.»

Poilievre réagit

L’équipe responsable des médias sociaux de Pierre Poilievre a réagi à ces commentaires en déclarant: «Trump a appuyé Mark Carney.»

Lors d’une conférence de presse à Sudbury, en Ontario, mardi matin, M. Poilievre a soutenu que le chef d’État américain avait raison de laisser entendre qu’il serait un premier ministre avec lequel il serait difficile de négocier.

«C’est vrai, a-t-il affirmé. Je suis un gars qui est fort et qui est ferme, quelqu’un qui reste fidèle à ses convictions et qui va mettre le Canada d’abord.»

Le chef conservateur a soutenu que les libéraux ont bloqué des projets d’exploitation des ressources, augmenté les taxes et poussé des milliards de dollars d’investissements vers les États-Unis.

«Mark Carney va se soumettre et ses politiques libérales maintiendront le Canada dans un état de faiblesse», a déclaré Pierre Poilievre.

Le cabinet du premier ministre n’a pas répondu aux questions concernant les propos de M. Trump mercredi.

Interrogé sur l’affirmation de M. Poilievre selon laquelle il serait la personne la mieux placée pour affronter Donald Trump, le ministre des Finances, François-Philippe Champagne, a rétorqué: «Je le connais depuis 10 ans, et il ne me semble pas très coriace.»

«Je dirais que ce dont nous avons besoin maintenant, ce sont des personnes expérimentées et sérieuses à la tête de ce pays, et je pense que c’est ce que le premier ministre Carney apporte», a ajouté M. Champagne à son arrivée à une réunion du comité du Cabinet sur la colline du Parlement.

Les libéraux remontent dans les sondages

Des sondages récents suggèrent que Donald Trump et ses menaces de droits de douane changeantes constituent un enjeu majeur pour les Canadiens à l’approche des élections fédérales, certains d’entre eux citant le président américain comme principale source de préoccupation des électeurs.

Les sondeurs ont également demandé aux Canadiens qui, selon eux, était le mieux placé pour affronter l’imprévisible locataire de la Maison-Blanche.

Lundi, Angus Reid a publié un sondage demandant à 4009 personnes de nommer le candidat le plus apte à gérer divers enjeux, notamment la guerre commerciale avec les États-Unis, la nécessité d’accroître les échanges commerciaux avec d’autres pays et les menaces de M. Trump de faire du Canada le 51e État.

À ces trois questions, plus de 53 % des répondants ont choisi Mark Carney, tandis qu’entre 28 % et 31 % ont préféré Pierre Poilievre.

M. Carney avait également une avance de six points sur M. Poilievre lorsqu’on leur a demandé quel serait le chef le plus susceptible de réduire le coût de la vie. C’est cet enjeu qui avait donné aux conservateurs une avance de 25 points sur les libéraux dans les sondages il y a un an.

Mais depuis l’élection de Donald Trump en novembre, le paysage politique au Canada a radicalement changé.

La décision de Justin Trudeau de démissionner début janvier et la course à la direction du Parti libéral qui a suivi ont fait grimper la cote des libéraux.

L’arrivée chaotique du candidat républicain à la Maison-Blanche, ses droits de douane intermittents et ses discussions incessantes sur l’intégration du Canada aux États-Unis ont suscité une vague massive de fierté nationale canadienne et ont incité de nombreux électeurs à reconsidérer leurs choix. Les principaux sondeurs, dont Léger, affirment maintenant que les libéraux ont une légère avance dans le soutien populaire.

Le premier ministre Carney n’a pas parlé à Donald Trump depuis son investiture, vendredi dernier. Il a effectué son premier voyage international à Paris et à Londres, et a déclaré qu’il ne conclurait un accord avec le président américain que lorsque celui-ci commencera à respecter la souveraineté canadienne.

Les sondages suggèrent que la grande majorité des Canadiens ont une opinion négative de Donald Trump.

Dans un sondage Abacus Data publié dimanche, 65 % des répondants ont dit avoir une opinion très négative du dirigeant américain, et seulement 13 % ont déclaré une opinion positive.

Alors que près de 90 % des électeurs libéraux n’aiment pas M. Trump, 23 % des électeurs conservateurs ont indiqué avoir une opinion positive de lui.

Ces dernières semaines, les libéraux ont concentré la plupart de leurs publicités offensives sur des comparaisons entre MM. Poilievre et Trump, avec des vidéos où les deux dirigeants utilisent des expressions comme «bon sens», affirment que les choses sont «défectueuses» et s’en prennent à ce qu’ils qualifient d’idéologie radicale «woke».

Donald Trump a soutenu qu’il n’aimait pas Pierre Poilievre parce qu’il n’était «pas un partisan du MAGA», en référence à son slogan «Make America Great Again».

Le chef conservateur a acquiescé, déclarant aux journalistes le mois dernier qu’il était un partisan du «Canada d’abord» et qu’il se fichait que les autres dirigeants mondiaux n’apprécient pas cela.

On ne peut attribuer de marge d’erreur aux sondages, car les sondages en ligne ne sont pas considérés comme des échantillons véritablement aléatoires.

Lors de son entrevue avec Donald Trump, la journaliste Laura Ingraham l’a pressé d’expliquer son «objectif final» concernant le Canada et les droits de douane. «Mon objectif final est de ne pas avoir un gros déficit», a-t-il répondu.