Montréal a souligné la mémoire des 14 femmes abattues à l’École Polytechnique en 1989

MONTRÉAL — Une commémoration a été tenue mardi soir sur le belvédère Kondiaronk, sur le mont Royal, afin d’honorer la mémoire des 14 femmes assassinées lors de la tuerie à l’École Polytechnique de Montréal, le 6 décembre 1989.

Ce jour-là, un homme armé avait fait irruption dans les locaux de l’établissement et avait ouvert le feu, assassinant 14 femmes et blessant 13 autres personnes.

La cérémonie, qui rassemblait familles de victimes, dignitaires et membres du public, a débuté avec un mot de la présidente du Comité Mémoire, Catherine Bergeron. La sœur d’une des victimes a souligné l’importance du devoir de mémoire, qu’elle juge «plus pertinent que jamais».

«33 ans plus tard, nous sommes encore ici, car nous savons qu’il est important d’entretenir la mémoire de ses 14 femmes magnifiques, dont l’élan a été coupé. […] Nous y sommes encore pour tendre nos mains et ériger des passerelles pour que nos filles et nos consœurs puissent accéder à leurs rêves et faire respecter leurs droits», a déclaré Mme Bergeron.

La mairesse de Montréal, Valérie Plante, le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, et celui du Québec, François Legault, ont déposé des roses blanches – symbole de la tragédie – devant les photos des femmes emportées lors de l’attentat antiféministe. Plusieurs autres dignitaires présents, dont la ministre responsable de la Condition féminine, Martine Biron, ont fait de même.

Aux alentours de 17h10, heure à laquelle les premiers coups de feu avaient retenti il y a 33 ans, 14 faisceaux de lumière ont été allumés, un à un, à l’appel du nom des 14 victimes. Pour une neuvième année consécutive, l’installation créée par Moment Factory, à l’initiative de la Ville de Montréal et du Comité Mémoire, visait à rendre hommage aux femmes assassinées lors de la tuerie.

Les remous de la loi C-21

Dans une déclaration aux médias, le premier ministre Justin Trudeau a affirmé que la lutte contre la violence fondée sur le sexe était «la responsabilité de tous», ajoutant que le gouvernement canadien continuait à aller de l’avant avec des mesures de contrôle des armes à feu. 

«On espère que tous les partis à la Chambre des communes vont comprendre que d’éliminer les armes qui sont faites pour tuer le plus grand nombre de personnes le plus rapidement possible, c’est quelque chose que nous devons tous faire», a soutenu M. Trudeau, soulignant aussi avoir «banni l’arme utilisée à Polytechnique».

Alors que le débat entourant le projet de loi fédéral C-21 s’envenime depuis les propos tenus samedi par Carey Price au sujet du registre des armes à feu, le premier ministre a précisé que le gouvernement ne tentait pas «d’aller chercher les carabines et les fusils de chasse», mais que certaines armes étaient simplement «trop dangereuses» pour circuler au Canada.

Questionnée sur la récente polémique, la directrice générale de l’École Polytechnique, Maud Cohen, a affirmé que l’établissement cherchait avant tout à honorer la mémoire des 14 victimes de la tragédie.

«On veut reconnaître les femmes qui ont perdu leur vie parce qu’elles étaient des femmes dans une école d’ingénierie, dans une profession qui était à l’époque beaucoup plus masculine, a-t-elle précisé. […] Il faut continuer à sensibiliser les jeunes à la violence faite aux femmes, mais aussi à la violence en général.»

Mme Cohen a également condamné l’utilisation du mot «POLY» comme code promotionnel par la Coalition canadienne pour les droits des armes à feu, qu’elle a qualifiée d’«inappropriée».

Un nombre de féminicides «alarmant»

De son côté, le premier ministre François Legault a invité la population québécoise à être «vigilante» afin de prévenir les violences faites aux femmes, en plus d’affirmer que les gouvernements allaient travailler pour «limiter les armes».

«Il y a encore des femmes, en 2022, qui sont violentées, parfois assassinées par leur mari, donc il reste du travail à faire. On a tous un devoir de vigilance ; c’est pas le Québec qu’on souhaite», a-t-il déclaré aux médias.

Aux yeux de la mairesse de Montréal, Valérie Plante, le nombre de féminicides survenus au Québec est «alarmant». Elle a d’ailleurs rappelé la nécessité d’aider les femmes victimes de violences, mais aussi de «soutenir les hommes» dans le besoin.

«C’est important de continuer à lutter contre la violence faite aux filles et aux femmes par des moyens concrets, que ce soit avec des centres d’hébergement ou au niveau du bannissement des armes d’assaut», a-t-elle déclaré aux médias.

Des cérémonies de commémoration ont également eu lieu dans la plupart des grandes villes du Canada, ce mardi.

Cet article a été produit avec le soutien financier des Bourses Meta et La Presse Canadienne pour les nouvelles.