La tempête Fiona met en lumière la fragilité des réseaux électriques

HALIFAX — Des résidants des Maritimes qui ont été privés d’électricité pendant des jours après le passage de Fiona se demandent si les services publics ont adéquatement préparé leurs réseaux pour résister aux puissantes tempêtes qui frappent de plus en plus la région de l’Atlantique.

«Les gens en Nouvelle-Écosse s’attendent en général à ce que si le vent souffle, il y ait un risque de perte d’électricité», admettait mercredi Amanda Dodsworth, qui passait une quatrième matinée sans courant. 

Mais elle souligne que dans son quartier, situé à dix kilomètres du centre de Halifax, la tempête post-tropicale Fiona a touché terre avec beaucoup moins de férocité que dans le nord-est de la Nouvelle-Écosse et au Cap-Breton — elle a sectionné des branches, mais pas renversé de grands arbres et abattu des poteaux. «Je pense qu’une partie du problème est qu’il y a un manque d’entretien général des lignes et des poteaux», dit-elle.

Pendant ce temps, un conseiller de la municipalité régionale de Halifax, Sam Austin, a déclaré qu’il avait reçu un déluge de courriels de résidants de Dartmouth Centre, qui se demandaient pourquoi des dommages apparemment limités les avaient privés d’électricité pendant près d’une semaine, alors que l’ouragan Juan, en 2003, avait été bien pire. 

«La patience des gens a ses limites, dit M. Austin, qui a une formation d’urbaniste. Nous allons devoir commencer à renforcer nos infrastructures, en particulier nos systèmes électriques, car faire comme avant ne suffira plus.»

Lors d’un point de presse mercredi après-midi, Matt Drover, responsable de la réponse de Nova Scotia Power à Fiona, a déclaré que le service public privé devait composer avec des milliers de lignes brisées et des centaines de poteaux endommagés. Environ 415 000 clients ont été privés d’électricité depuis samedi; Nova Scotia Power a déclaré mercredi que le courant était rétabli pour plus des trois quarts d’entre eux. 

L’entreprise privée responsable de l’électricité en Nouvelle-Écosse a été souvent critiquée ces dernières années, écopant notamment une amende de 250 000 $ de la régie provinciale en 2020 pour ne pas avoir respecté les normes de fiabilité, notamment à cause de la fréquence et de la durée des pannes.

Enfouissement ou élagage ?

M. Drover a déclaré mercredi que le service public, qui appartient à l’entreprise Emera, de Halifax, a fait des progrès dans le renforcement de son réseau. «Nous nous concentrons sur l’élagage des arbres. Nous dépensons plus de 20 millions $ (par année) pour la gestion de la végétation dans toute la province», a-t-il soutenu. 

Il a également déclaré que même si certains résidants ne voient devant chez eux que quelques branches coupées, il est possible que la panne ait été causée par la chute d’un arbre beaucoup plus gros «plus loin sur la ligne».

Kevin Mullen, directeur d’une entreprise d’énergie renouvelable basée à Halifax – GreenQuest Power – croit que le modèle de surveillance de Nova Scotia Power devait changer, pour donner au régulateur la capacité d’imposer des sanctions plus sévères si les normes de fiabilité ne sont pas respectées. Par ailleurs, d’autres solutions sont «à portée de main», dit-il, comme l’enfouissement des lignes, l’élagage systématique des arbres et la mise à niveau des transformateurs.

À l’Île-du-Prince-Édouard, 90 % des clients étaient sans électricité au plus fort de la tempête samedi. Maritime Electric, une filiale de l’entreprise Fortis, a souligné jeudi matin qu’environ la moitié de ces clients, soit 41 000, avaient maintenant retrouvé le courant. 

Kim Griffin, porte-parole de Maritime Electric, soutient que le réseau a bien résisté dans l’ensemble. «Le fait est que nous construisons selon les normes canadiennes», a-t-elle affirmé mercredi lors d’une séance d’information.

Elle a également déclaré que le service public travaillait sur une étude évaluant les impacts qu’aura le changement climatique dans les décennies à venir, qui sera publiée plus tard cette année, après quoi on procédera à d’autres planifications sur les infrastructures. «Ce n’est pas quelque chose que vous pouvez investir dans votre système du jour au lendemain», a-t-elle dit.