GNL Québec: Poilievre «pense pouvoir convaincre les Québécois»
SAGUENAY, Ont. — Le chef conservateur Pierre Poilievre veut ressusciter le projet de gaz liquéfié GNL Québec et «pense pouvoir convaincre les Québécois» de sa pertinence, même s’il a été refusé à l’époque, notamment en raison du manque d’acceptabilité sociale.
«Le statu quo où nous vendons 100 % de notre gaz naturel aux États-Unis pour profiter à Donald Trump n’a pas d’acceptabilité sociale», a lancé le chef conservateur en mêlée de presse jeudi à Jonquière, au Saguenay-Lac-Saint-Jean.
Rappelons qu’en 2021, Québec a refusé d’autoriser le projet de pipeline et de terminal méthanier à Saguenay pour exporter du gaz naturel albertain. Ottawa a fait de même en 2022.
Les droits de douane américains ont toutefois entraîné un changement de ton de ce côté-ci de la frontière. Québec et Ottawa ont rouvert la porte au projet récemment.
«GNL Québec pourrait être l’usine de liquéfaction de gaz naturel la plus propre au monde. Pourquoi? Parce que ça va être alimenté par l’hydroélectricité zéro émission», a renchéri le chef conservateur.
En avril 2021, le rapport du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) affirmait clairement qu’il n’y avait pas d’acceptabilité sociale dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean et que le projet n’avait pas démontré sa pertinence.
L’objectif de l’usine était d’exporter par voie navale, chaque année, 11 millions de tonnes de gaz naturel provenant de l’Ouest canadien vers l’Europe et l’Asie, pour une période allant de 25 à 50 ans. Un gazoduc de 780 kilomètres de long devait aussi être construit par l’entreprise Gazoduq, afin d’acheminer le gaz de l’Ontario au Saguenay.
«Zones canadiennes prêtes à bâtir»
Pierre Poilievre était d’ailleurs de passage dans la région pour annoncer que s’il est élu premier ministre, il compte accélérer les projets énergétiques comme GNL Québec. Pour ce faire, il veut désigner des secteurs comme des «zones canadiennes prêtes à bâtir».
Il s’agirait en fait de «zones préapprouvées et préautorisées» pour la construction de projets comme des mines, des centres de données, des centrales électriques et des usines de liquéfaction de GNL. L’objectif est notamment d’accélérer l’octroi de permis afin de permettre aux entreprises de construire plus rapidement.
Le chef conservateur a indiqué qu’il comptait travailler avec le gouvernement du Québec afin de donner cette désignation au Saguenay pour accélérer le projet d’usine de gaz naturel liquéfié.
Le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, soutient que Pierre Poilievre fait miroiter un «mirage» aux électeurs.
«Que ce soit Énergie Est ou GNL, avant que ce soit construit, on parle de minimum huit à dix ans. Huit à dix ans pendant lesquels l’Europe continue à réduire sa consommation de gaz et de pétrole, alors que déjà personne en Europe dit être intéressé par le pétrole ou le gaz du Canada. Donc, on met en place quelque chose qui va coûter des dizaines de milliards et on va arriver, pas de marché et pas d’intérêt», a-t-il affirmé en entrevue avec La Presse Canadienne jeudi.
Ne cherche pas l’appui de Legault
Le premier ministre François Legault a discuté avec M. Poilievre jeudi après-midi à Québec, lors d’une rencontre où il a dit avoir mis de l’avant deux enjeux qui sont vitaux pour la province.
Dans une publication sur le réseau social X, M. Legault a indiqué avoir rencontré M. Poilievre avec le ministre québécois de la Justice, Simon Jolin-Barrette.
«Dans les négociations à venir avec les États-Unis, le gouvernement fédéral doit défendre les secteurs-clés de l’économie québécoise, incluant la gestion de l’offre pour protéger nos agriculteurs en région», a écrit le premier ministre Legault, énumérant les enjeux qu’il a abordés avec M. Poilievre.
Il a aussi dit avoir mis de l’avant que «le gouvernement fédéral doit réduire de façon significative le nombre d’immigrants temporaires au Québec pour protéger l’avenir du français».
M. Legault rencontrera vendredi le premier ministre Mark Carney à Ottawa, en compagnie des premiers ministres des provinces et des territoires.
Lors des précédentes élections, en 2021, M. Legault avait donné un appui implicite à Erin O’Toole, le prédécesseur de M. Poilievre.
Le chef conservateur a dit jeudi qu’il ne cherchait pas à avoir l’appui du premier ministre québécois.
«Si c’est offert, on va évidemment l’accepter. Mais surtout, je cherche l’appui des populations des provinces à travers le Canada», a-t-il affirmé.
Le premier ministre Legault avait expliqué, lors de la précédente campagne, que M. O’Toole était le seul des chefs de partis fédéraux pouvant former un gouvernement à se montrer ouvert aux revendications du Québec.
Il avait noté que son premier choix était l’élection d’un gouvernement conservateur minoritaire.
Or, la relation qu’entretient M. Legault avec les deux conservateurs est loin d’être semblable. À titre de comparaison, il a fallu huit mois après l’élection de M. Poilievre comme chef conservateur pour qu’il rencontre le premier ministre, mais trois semaines lorsque M. O’Toole est entré en fonction.
En septembre, le premier ministre Legault a néanmoins semblé prendre parti pour les conservateurs en demandant carrément au Bloc québécois de voter avec les troupes de M. Poilievre pour renverser le gouvernement de Justin Trudeau, sous prétexte qu’Ottawa n’en faisait pas assez dans le dossier de l’immigration.
Il a par la suite tenté de corriger le tir en indiquant qu’il pourrait appuyer un parti fédéral s’il satisfait à sa demande de s’engager à réduire de moitié l’immigration temporaire au Québec.