Des «antivax» bloqués à l’assurance-emploi ont pu toucher des prestations de maladie

OTTAWA — Des documents internes montrent que le gouvernement fédéral n’aurait pas pu empêcher toutes les personnes non vaccinées de toucher certaines prestations d’assurance-emploi, comme les libéraux l’avaient espéré afin d’augmenter la pression sur les «hésitants».

Des notes d’information préparées pour la ministre fédérale de l’Emploi, Carla Qualtrough, lui rappellent que les travailleurs non vaccinés peuvent être admissibles aux prestations de maladie du programme d’assurance-emploi, même s’ils ont précisément attrapé la COVID-19. Les lois régissant ce filet de sécurité sociale ne contiennent en effet aucune règle explicite concernant l’admissibilité à l’assurance-emploi pour une personne qui refuserait de se faire vacciner.

La ministre Qualtrough avait certes été informée que le gouvernement pouvait imposer des règles sur les prestations régulières d’assurance-emploi, mais les responsables ont suggéré qu’Ottawa ne pouvait pas en faire autant avec les prestations de maladie de l’assurance-emploi. 

Des documents préparés par le ministère de Mme Qualtrough l’automne dernier suggèrent que les hauts fonctionnaires ont déconseillé de bloquer à ces non-vaccinés l’accès aux prestations de maladie. Les documents montrent que les responsables estimaient qu’il était «sans doute encore plus» important pour les non-vaccinés de recevoir un soutien financier afin qu’ils puissent s’isoler après un test positif et ne pas être tentés d’aller travailler — et d’infecter leurs collègues.

Les détails sont contenus dans des documents obtenus par La Presse Canadienne en vertu de la Loi sur l’accès à l’information. Ils décrivent certaines des mesures prises au gouvernement fédéral alors que les responsables à Ottawa se préparaient à une vague de licenciements de travailleurs qui refuseraient de se faire vacciner.

Les fonctionnaires ont caviardé de grandes sections des documents parce qu’ils contiennent des avis politiques et juridiques.

Un de ces documents, élaboré par Emploi et Développement social Canada à l’automne, précisait que les travailleurs qui démissionnent, sont congédiés ou suspendus sans solde parce qu’ils choisissent de ne pas se faire vacciner pourraient «remettre en question l’admissibilité aux mesures de soutien du revenu» comme l’assurance-emploi et une série de prestations d’urgence.

Le gouvernement a finalement décidé d’empêcher les travailleurs non vaccinés de recevoir des prestations d’assurance-emploi «régulières», mais il a fixé aux employeurs certains paramètres à suivre, notamment une politique de vaccination claire et des mesures à prendre avant le licenciement.

Combien ont été bloqués?

Comme les dossiers l’indiquent à maintes reprises, l’agence Service Canada s’est finalement fiée aux employeurs qui remplissaient avec précision les formulaires pour déterminer si quelqu’un pouvait avoir accès aux prestations régulières d’assurance-emploi.

Le ministère de Mme Qualtrough n’avait pas encore répondu, jeudi, aux questions qui lui ont été posées plus tôt cette semaine au sujet de cette politique, y compris combien de travailleurs ont été empêchés de toucher des prestations régulières d’assurance-emploi.

La loi régissant le système d’assurance-emploi stipule qu’un travailleur peut recevoir des prestations s’il perd son emploi sans qu’il y ait faute de sa part, mais pas s’il a décidé de démissionner ou s’il a été congédié en raison d’une inconduite.

Mais même en cas d’inconduite, la loi sur l’assurance-emploi stipule expressément qu’un travailleur aurait toujours droit aux «prestations spéciales» du système, comme les prestations de maladie, les congés de maternité et les congés parentaux.

Les responsables ont noté l’automne dernier que le non-respect de la politique de vaccination d’un employeur – et les documents suggèrent que ce serait le cas pour les employés fédéraux soumis à l’obligation vaccinale – ne priverait pas un travailleur des prestations de maladie de l’assurance-emploi.

«La Loi sur l’assurance-emploi ne refuse pas l’accès aux prestations de maladie dans des circonstances où les personnes s’exposent sciemment à des risques, de sorte que les personnes qui choisissent de ne pas être vaccinées pourraient toujours accéder aux prestations de maladie de l’assurance-emploi si elles étaient malades de la COVID-19», lit-on dans une note d’information à la ministre Qualtrough.

La note poursuit en précisant que le même constat s’applique à la Prestation canadienne de maladie pour la relance économique, qui verse 450 $ après impôt à tout travailleur qui est malade, qui doit s’isoler en raison de la COVID-19 ou qui a un problème de santé sous-jacent qui le met plus à risque de contracter la maladie. Cette prestation fédérale doit être abolie le 7 mai.