Campagne électorale 2022 de la CAQ: sous le signe de la continuité

QUÉBEC — Le portrait de famille que présentera la Coalition avenir Québec (CAQ) à la population lors du déclenchement de la campagne électorale, à la fin de l’été, risque fort de ressembler étrangement à celui de 2018, avec quelques rides en plus.

À moins de cinq mois du début de la course, tout indique qu’il y aura très peu de mouvement dans l’équipe entourant François Legault à la recherche d’un deuxième mandat. Pas de vagues de départs en vue, donc, ni de tentative de se donner un nouveau visage. 

Contrairement à celle du Parti libéral du Québec (PLQ), qui fera peau neuve dans l’espoir de reconquérir le cœur des Québécois, la prochaine campagne électorale de la CAQ s’annonce sous le signe de la stabilité et de la continuité.

Selon les informations recueillies au cours des dernières semaines par La Presse Canadienne, auprès d’organisateurs caquistes et de plusieurs élus de cette formation, députés et ministres, on doit s’attendre à ce que la grande majorité des députés caquistes actuels et des membres du conseil des ministres solliciteront une nouvelle fois l’appui des électeurs pour les représenter jusqu’en 2026.

Tout au plus, dans les rangs du parti et du caucus, s’attend-on à compter les départs sur les doigts d’une main, même s’ils sont nombreux à avoir atteint l’âge habituel de la retraite.

Le caucus de la CAQ est vieillissant: près de 30 % de l’équipe actuelle a plus de 60 ans, un âge où bien des gens songent plus à planifier leur retraite qu’à signer un contrat de travail de quatre ans. Au terme d’un éventuel second mandat, François Legault aura 69 ans. 

Parmi les 26 ministres, il n’y a que trois noms qui figurent sur la liste des départs attendus ou possibles. Personne ne sera surpris d’apprendre que la ministre des Aînés, Marguerite Blais (Prévost), qui aura 72 ans lors de la prochaine campagne, va probablement tirer sa révérence, compte tenu des ennuis de santé qui l’ont ralentie pendant des mois et des difficultés rencontrées depuis le début de la pandémie dans la gestion des CHSLD. Le même sort devrait attendre la ministre de l’Enseignement supérieur, Danielle McCann (Sanguinet), âgée de 69 ans. 

De son côté, le ministre de la Santé, Christian Dubé (La Prairie), qui aura 66 ans le jour du prochain scrutin, aura-t-il le goût de s’engager pour les quatre prochaines années? Il maintient le suspense et personne ne s’aventure à prédire ce qu’il fera. Officiellement, il est en réflexion.

La ministre des Relations internationales, Nadine Girault (Bertrand), 63 ans, qui a dû combattre un cancer et des problèmes de dos l’ayant obligée à interrompre un temps ses obligations professionnelles, a réfléchi puis a décidé de solliciter un deuxième mandat.

Très proche du premier ministre, le ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, qui a dû se retirer un temps du conseil des ministres pour se conformer au code d’éthique des parlementaires, a remis en question son engagement politique tout au long du mandat, mais a dit en septembre dernier qu’il serait sur les rangs pour un second mandat au terme duquel il approchera les 72 ans. 

Parmi les députés qu’on s’attend à voir laisser la place à d’autres, notons les noms de l’ex-ministre MarieChantal Chassé (Châteauguay), Claire Isabelle (Huntingdon), Suzanne Dansereau (Verchères), bientôt âgée de 70 ans et qui a déjà fait son annonce, Lise Lavallée (Repentigny) et Denis Tardif (Rivière-du-Loup-Témiscouata), qui éprouve des ennuis de santé depuis des années.

Certains hésitent encore et sont officiellement ou non en «réflexion». Parmi eux, Émilie Foster (Charlevoix-Côte-de-Beaupré), Jean-Bernard Émond (Richelieu) et Louis-Charles Thouin (Rousseau), qui avait été momentanément écarté du caucus pour des raisons d’éthique.

D’autres députés ont réfléchi un temps et ont finalement décidé de solliciter un autre mandat, notamment un vétéran, Marc Picard (Chutes-De-La-Chaudière), âgé de 66 ans et qui sera en quête d’un septième mandat, Éric Lefebvre (Arthabaska), Gilles Bélanger (Orford) et l’ex-ministre Sylvie D’Amours (Mirabel). 

À Québec, le député Mario Asselin (Vanier-Les-Rivières), âgé de 60 ans, a connu de graves problèmes de santé, ayant subi un accident vasculaire cérébral (AVC) qui lui a fait perdre momentanément l’usage de la parole. Il revient de loin et sera lui aussi candidat.

En Outaouais, le député Robert Bussière (Gatineau), qui aura 67 ans cet été, a été victime d’un infarctus en 2019, et fera partie de l’équipe encore une fois.

Dans Portneuf, le député Vincent Caron doit annoncer ses couleurs jeudi.

Ceux et celles qui hésitent encore ou préfèrent garder le secret devront accélérer le processus et se faire une idée d’ici la fin de la session parlementaire, le 10 juin. 

La campagne électorale ne sera déclenchée officiellement qu’à la fin du mois d’août, mais tout se met déjà en place.

L’Assemblée nationale compte 125 sièges et la CAQ en détient 75. Au fil des ans, la popularité du parti de François Legault n’a pas fléchi. Si elle se maintient aux niveaux stratosphériques actuels, soit autour de 40 % d’appuis, le site de projections électorales Qc125 prévoit que la CAQ pourrait accaparer une centaine de sièges le 3 octobre.

L’adhésion de la population au gouvernement de François Legault n’est sûrement pas étrangère à la décision de plusieurs députés et ministres de se porter candidats pour un autre mandat, qui semble à portée de main, à quelques mois de l’échéance.

Certains députés laissés de côté lors de la formation du conseil des ministres y verront une occasion d’avoir enfin, peut-être, la chance de faire partie du cabinet.

L’organisation électorale est déjà sur les rails. Plusieurs élus ont déjà fait prendre leur photo. Pour ce qui est des rassemblements, on va prévoir un plan A (sans COVID) et un plan B (avec COVID et éventuelles mesures sanitaires à respecter). Dans un cas comme dans l’autre, le mode virtuel sera privilégié pour certaines activités partisanes.

Le processus de recrutement de candidats, surtout pour la cinquantaine de circonscriptions orphelines, est entamé depuis un an et demi. Comme en 2018, la CAQ tentera de présenter une équipe composée à 50 % de femmes.

Lundi, on a démarré le processus d’annonces de candidats, avec la candidature de l’ex-mairesse de Sainte-Julie et ancienne présidente de l’Union des municipalités, Suzanne Roy, dans Verchères, l’ancienne circonscription péquiste de Bernard Landry. 

Sur le plan régional, la CAQ cherchera à s’implanter en Gaspésie, territoire péquiste qui lui a résisté en 2018. Parmi les candidats-vedettes convoités, le parti misait notamment sur Claudine Roy, véritable institution en Gaspésie, dynamique entrepreneure à la tête de la Traversée de la Gaspésie et propriétaire de l’Auberge sous les arbres, où ont séjourné notamment l’épouse du premier ministre, Isabelle Brais, au cours de la dernière année, et quelques ministres qui lui ont fait une cour assidue. Mais Mme Roy a jonglé avec l’idée pendant des mois avant de décliner l’offre.

Dans Rimouski, où l’ex-péquiste Harold LeBel, accusé d’agression sexuelle, a annoncé qu’il ne serait pas candidat, la CAQ prévoit miser sur l’ex-mairesse de Sainte-Luce, Maïté Blanchette-Vézina.

Dans Marie-Victorin, autre circonscription depuis longtemps péquiste, la CAQ subira un premier test de popularité lundi soir prochain, lors de l’élection complémentaire qui pourrait être serrée. On verra à quel point sa machine est bien rodée.