À quelques mois des élections, les libéraux québécois peinent à se définir

MONTRÉAL — À quelques mois des élections générales au Québec, les libéraux peinent encore à se définir et à rétablir les liens avec les francophones sans perdre l’appui des anglophones et des allophones.

Aux élections de 2018, le PLQ n’avait remporté que quatre sièges à l’extérieur de la grande région de Montréal. Il a perdu deux d’entre eux au cours d’élections partielles: Roberval et Jean-Talon.

Lors de la dernière élection partielle dans la circonscription de Marie-Victorin, en Montérégie, la candidate libérale Émilie Nollet n’a pu faire mieux que la cinquième place, n’obtenant que 6,93 % des suffrages exprimés.

«Le paysage politique québécois s’est transformé, note la politologue Valérie-Anne Mahéo, de l’Université Laval. Le débat était axé autour de la question de la souveraineté et du fédéralisme. Il s’est déplacé vers une situation politique prétendument plus normale, sur un axe gauche-droite. Les partis se font concurrence sur le plan social et économique.»

Les libéraux peinent aussi dans les intentions de vote. Un sondage de la firme Léger ne leur accordait récemment que 17% d’appuis, très loin derrière la Coalition avenir Québec. C’est également un recul de huit points de pourcentage par rapport aux élections de 2018.

Ils ont même glissé au quatrième rang dans la région de Québec. Ils sont au troisième rang à l’extérieur de Montréal et de Québec.

Philippe J. Fournier, le créateur du site de projections des résultats Qc125, pressent un désastre pour les libéraux en octobre. Si les libéraux étaient arrivés deuxièmes dans bon nombre de circonscriptions en 2018,  il ne croit pas que cela sera le cas en octobre.

«Il existe une base d’électeurs libéraux dans plusieurs endroits de la province, mais dans les sondages régionaux au Saguenay-Lac-St-Jean, en Abitibi ou dans les Cantons de l’Est, ils se sont complètement évaporés», souligne M. Fournier.

Chez les francophones, les libéraux sont à égalité au quatrième rang à 11% des intentions de vote, derrière Québec solidaire et le Parti conservateur, une formation qui n’a jamais fait élire un candidat à l’Assemblée nationale. Les conservateurs comptent une députée dans leur rang, mais Claire Samson a été élue sous la bannière de la CAQ en 2018.

Certains libéraux aimeraient bien que leur parti occupe une partie du terrain laissée aux nationalistes non-souverainistes afin de gagner des appuis à l’extérieur de Montréal.

Selon Benoît Pelletier, un ancien ministre de Jean Charest, déplore que le PLQ ait négligé les questions d’identité. Il souhaite que la formation redéfinisse sa relation avec les Québécois, plus particulièrement sa majorité francophone.

Il veut que les libéraux défendent encore plus fermement la langue française et la culture québécoise. Il regrette la position ambiguë du parti sur le projet de loi sur la réforme des lois linguistiques.

«Cette ambiguïté, cette ambivalence est quelque chose de négatif et nuit au parti», soutient M. Pelletier.

Signe de cette ambivalence: les libéraux ont présenté un amendement au projet de loi 96 visant à obliger les étudiants des cégeps anglophones de suivre trois cours en français — mais pas un cours de français — pour obtenir un diplôme. Ils l’ont retiré sous la pression de députés et de base anglophones du parti.

L’épisode reflète les tensions régnant au sein du PLQ sur les questions d’identité. Il démontre la difficulté d’élargir la base électorale francophone sans s’aliéner la base anglophone et allophone.

Mécontentement anglophone

Et en même temps, même le vote des anglophones n’est peut-être pas acquis pour les libéraux.

Balarama Holness, un ancien candidat à la mairie de Montréal, a annoncé mercredi son intention de créer un nouveau parti pour défendre les droits des minorités ethniques et linguistiques de la province. Un autre groupe envisage de l’imiter.

Même s’il doute que ses nouveaux partis remportent des sièges, M. Fournier croit qu’ils pourraient permettre à la CAQ de s’emparer de certains sièges chaudement disputés.

La chef Dominique Anglade ne s’en préoccupe pas vraiment. Le problème, ce n’est pas le message que son parti porte, c’est plutôt que les gens ne l’ont pas encore entendu.

«Les sondages sont des sondages. Ils donnent une image de la situation présente. Nous n’avons pas été en mesure de communiquer toutes nos idées. Nous n’avons pas été aussi présents que nous aurions aimé être. C’est pour ça que je suis emballée par la prochaine campagne.»