René Lafrenière: maître de la gouge et du relief

PORTRAIT. « C’est une véritable passion. Quand j’embarque là-dedans, le temps s’arrête. Ça me relaxe. Tu travailles trois heures et tu as l’impression d’avoir travaillé 15 minutes. »

Ce n’est pas d’hier que René Lafrenière travaille le bois. À l’aide de son maillet et de ses gouges, l’homme de Saint-Alexis-des-Monts laisse aller son talent et sa créativité depuis 45 ans. Il s’adonne à la sculpture sur bois et se démarque avec ses œuvres polychromes en haut-relief et en ronde bosse.

Sa collection de 31 scènes animalières sur blocs de bois, à laquelle il a consacré plus de 20 000 heures, est fascinante. Elle était exposée à la salle communautaire de Saint-Alexis-des-Monts lors des derniers jours, dans le cadre du 150e anniversaire de la municipalité. C’est à cet endroit que la population avait l’occasion de découvrir les œuvres et d’admirer son savoir-faire. « Chaque oeuvre a un petit quelque chose d’unique. Je ne commence jamais une pièce sans l’avoir complètement terminée dans ma tête. J’aime bien reproduire l’animal dans son environnement », souligne l’artiste.

René Lafrenière fait preuve d’une grande patience et de minutie pour réaliser ses tableaux en pensant aux moindres détails. « Avant de faire de la sculpture, je faisais des paysages, mais la peinture n’était pas un réel défi pour moi. J’ai exposé 26 toiles et elles ont toutes été vendues. J’avais de la demande sauf que je n’avais pas le même plaisir que j’ai à faire de la sculpture », reconnait-il.

Dans son atelier, l’Aleximontois taille lui-même ses pièces de tilleul pour ses différents projets. Reconnu comme étant le bois des sculpteurs, le tilleul est un bois tendre et très facile à travailler à la gouge. « Une œuvre peut prendre de 650 à 700 heures d’ouvrage. Je travaille là-dessus de la fin septembre au début du mois de mai. Je vais jusqu’à neuf pouces d’épais. Normalement, les rares sculpteurs qui font du haut-relief vont jusqu’à deux pouces d’épais », précise-t-il.

Entre deux œuvres, pour éviter de perdre la main, M. Lafrenière fabrique également des horloges et des urnes avec des retailles de bois.

Apprendre d’un mentor

À ses débuts en sculpture, René Lafrenière a suivi les conseils de l’artiste Pierre-Gilles Dubois qui fut pour lui son mentor. « C’était un peintre et un sculpteur de renommée internationale. Il disait que j’avais les aptitudes pour sculpter. Il m’avait suggéré de développer mon propre style pour être à l’aise et de ne pas suivre de cours, car si tu suis un cours, tu vas adopter le style de ton professeur. Je me suis lancé dans le haut-relief. Il n’y a pas beaucoup de sculpteurs qui en font parce que c’est assez difficile », raconte l’artiste de Saint-Alexis-des-Monts.

« Il faut être téméraire un peu pour faire du haut-relief. Je n’ai pas peur de prendre certains risques. J’utilise la méthode à l’ancienne. Comme sur la glace mince, j’avance à petits pas pour chaque œuvre. Je n’ai jamais rencontré d’obstacles que je ne pensais pas vaincre. Quand ça va un peu moins bien, il ne faut pas s’énerver », ajoute-t-il.

Avant de débuter une œuvre, René Lafrenière a déjà une bonne idée du chemin qui se dessine devant lui. « Quand je commence une pièce, je sais ce qu’il va y avoir dedans, où seront positionnés mes sujets et les couleurs que je vais ajouter. J’ai cette facilité, car j’ai une mémoire photographique. Quand je donne les premiers coups de gouge, je sais où je m’en vais », partage l’homme de 80 ans.

Clin d’œil à l’histoire

Inspiré par le moment présent, l’histoire, des expériences personnelles ou des lieux visités, M. Lafrenière aimerait rendre un hommage aux draveurs dans ce qui pourrait être sa dernière sculpture en carrière. « Si je m’attaque à celle-là, ce sera la plus grosse. Je l’ai dans la tête. C’est un gros projet. Je suis encore en réflexion à savoir si je me lance ou pas », rapporte le sculpteur.

À travers ses différentes œuvres, l’artiste souhaite redonner à l’art populaire ses lettres de noblesse.

Les sculptures de René Lafrenière seront mises en vente prochainement. Les personnes intéressées devront toutefois passer à la caisse puisque sa collection complète est évaluée à plusieurs centaines de milliers de dollars.