Une précieuse ressource pour le monde agricole

AGRICULTURE. Absence de relève, rareté de la main-d’œuvre, diminution des revenus, surendettement, conditions météorologiques imprévisibles, hausse de la bureaucratie, instabilité des marchés, isolement social, transfert d’entreprise difficile, les facteurs de stress et d’anxiété sont nombreux chez les agriculteurs. Ils se répercutent bien souvent sur leur santé physique, psychologique et indirectement sur celle de leurs proches.

Depuis la fin septembre, les agriculteurs de la région peuvent compter sur le soutien d’une nouvelle travailleuse de rang de l’organisme Au cœur des familles agricoles (ACFA). Martine Fraser sillonne les routes de la Mauricie afin de venir en aide aux producteurs agricoles qui vivent de la détresse psychologique. Elle remplace Laurence Lemire qui occupait cette fonction.

«Personne n’est à l’abri d’une détresse psychologique»

– Martine Fraser

«C’est un heureux hasard de la vie. Je me trouve super chanceuse. J’étais dans une période de remise en question. J’ai déposé ma candidature après avoir visionné le documentaire La détresse au bout du rang. J’avais vu la ressource et je la connaissais. C’était quelque chose qui m’intéressait. La vie a bien fait les choses parce que j’ai finalement eu le poste», raconte-t-elle avec le sourire.

Passion: l’agriculture

La travailleuse de rang a grandi sur une ferme laitière dans le secteur de Mékinac et travaille actuellement sur un projet d’autosuffisance alimentaire. Sa connaissance du milieu, son dynamisme et son expérience font d’elle une candidate taillée sur mesure pour l’emploi.

«L’agriculture a toujours fait partie de ma vie. Ça me tient vraiment à cœur. C’était tout à fait naturel pour moi de retourner à mes racines dans ma Mauricie chérie. On a tellement un beau territoire et j’aime notre région. C’était le meilleur des deux mondes de faire ce travail-là et en même temps de pouvoir combiner l’intervention avec l’agriculture. C’est vraiment un retour aux sources», révèle Martine Fraser.

Dans ses temps libres, l’intervenante chausse ses bottes de travail et retourne donner un coup de main sur l’exploitation agricole familiale. «Je travaille encore à la ferme de temps en temps pour aider mon père. Ça me donne une crédibilité sur le terrain. Pour réussir à établir un lien de confiance, il faut que la personne comprenne la réalité de l’autre», souligne-t-elle.

De grands défis

Les agriculteurs n’ont pas tendance à aller chercher de l’aide psychologique lorsqu’ils en ont besoin par peur d’être incompris, de se faire étiqueter ou en raison de la difficulté à quitter la ferme. À l’instar du travailleur de rue, le travailleur de rang a comme mandat d’entrer en relation avec les personnes isolées là où elles sont et au moment qui leur convient le mieux. «Ce qui fait la force du travail de rang, c’est qu’on est à l’écoute des besoins de nos usagers et on peut facilement s’adapter à leur réalité. Si le producteur est dans les champs le jour et que ça lui adonne seulement de m’appeler à 21h le soir, je vais prendre le temps de lui parler à ce moment-là. On trouve ensemble des solutions pour qu’il puisse continuer d’être fonctionnel tout en respectant ses propres limites», informe Mme Fraser.

Selon l’UPA, la Mauricie compte 1472 producteurs et productrices agricoles et le territoire regroupe 994 fermes. Bien au fait des défis que doivent relever les agriculteurs, la jeune femme de 25 ans mise sur une approche humaine, personnalisée et collaborative pour permettre aux artisans de la terre de se sortir la tête hors de l’eau et favoriser leur épanouissement. «Les problèmes sont multiples. On parle beaucoup d’isolement, de dépression, de surcharge de travail, des conflits familiaux, de problèmes de santé mentale, de pression financière, climatique et publique. Ce ne sont pas des défis évidents à gérer. C’est un milieu composé majoritairement d’hommes, avec toute la culture qui vient autour de ça. Heureusement, c’est de plus en plus valorisé d’aller chercher de l’aide», note-t-elle.

«La force du monde agricole, c’est que c’est un petit milieu où tout le monde se tient. Si ce n’est pas le producteur lui-même qui prend la décision d’appeler, il sera peut-être référé par quelqu’un autour de lui. Il y a une belle solidarité. Il faut dire que le service est de plus en plus connu et les gens hésitent moins à nous appeler. Parfois, juste d’évacuer et de parler ça fait du bien. Personne n’est à l’abri d’une détresse psychologique. Notre rôle est très important», laisse tomber la travailleuse de rang.

Il est possible de joindre Martine Fraser en téléphonant au 450-768-6995.