Le lac St-Pierre en piètre état

Par Louise Grégoire-Racicot

LAC ST-PIERRE. En constatant le piètre état du lac Saint-Pierre, Louise Corriveau et Richard Carignan, ont une vision bien différente de ce que l’avenir lui réserve. C’est ce qui ressort du Forum organisé par la Table de concertation régionale du lac Saint-Pierre (TCRLSP), à Louiseville, le 29 mai dernier.

Une centaine de citoyens, représentants de ministères et d’élus municipaux ont échangé sur ce sujet. Louise Corriveau, à la tête du comité de la zone prioritaire (ZIP) du lac St-Pierre, organisait cette rencontre.

Cette dernière est particulièrement satisfaite de la formation du comité technique qui en a résulté. « Il doit identifier tous les éléments affectant l’état du lac et voir comment aborder ses problèmes. C’est un grand pas en avant d’autant que plusieurs de ces gens ne se parlaient jamais avant. Enfin, le comité ZIP ne se battra plus seul. »

Voilà pourquoi elle est plus optimiste que le chercheur de l’Université de Montréal, Richard Carignan, découragé de l’état du fleuve Saint-Laurent, au lac St-Pierre, aussi conférencier invité.

Reprenons des propos différents qu’ils ont tenus lors de deux entrevues téléphoniques distinctes menées au cours des derniers jours.

Au sujet de l’eau

Les choses se détériorent constamment depuis 12 ans. L’état de la perchaude en témoigne, dit M. Carignan.

« Oui, c’est vrai, l’état du lac ne s’est pas amélioré mais je ne suis pas prête à dire qu’il est pire qu’avant », remarque Mme Corriveau. Depuis 50 ans, dit-elle, la qualité de l’eau s’est un peu améliorée. On traite les eaux usées. Mais l’agriculture est plus intensive le long des berges, décrit-elle.

Il en résulte, rappelle M. Carignan, de la perte de jeunes poissons. Ceux qui se nourrissent dans les herbiers. Car on remarque aussi un déclin de ces herbiers.

« Ces pertes d’habitats peuvent être dues soit à la pollution agricole, soit à la pollution urbaine. Il faut étudier sérieusement la situation et avoir les ressources pour observer ce qui se passe dans ces eaux. Car on n’en a pas une idée exacte. »

En plus, décrit-il, les eaux propres du fleuve sont concentrées dans le chenal et non près des rives où la perchaude grandit. Ce qui confine la pollution agricole sur les rives, dit M. Carignan.

« Mais le ministère de l’Agriculture et l’UPA sont conscients que le statu quo ne peut plus durer. Ils seront du comité qui entreprendra ses travaux en septembre », précise Mme Corriveau.

L’après?

M. Carignan spécifie que faire des ports d’eau douce des ports de mer n’est pas sans danger. « Car on a permis d’introduire dans nos eaux des espèces invasives qui causent des dommages importants. »

Il faut aussi repenser l’agriculture, insiste M. Carignan. « Décider de ce que l’on fait pousser et où? Ça ne marche pas non plus de produire du maïs pour faire de l’éthanol pour faire rouler nos voitures. Mais le fleuve est le reflet de nos façons de faire. On ne pense pas à la protection de ses écosystèmes. »

Faire cohabiter les usages dans le littoral du lac est tout un défi à relever, croit Mme Corriveau, pour conserver les habitats et la biodiversité rattachés aux milieux humides. Ce qui implique non seulement l’amélioration de la qualité de l’eau mais aussi celle des pratiques agricoles dans cette zone. « Tous ces éléments seront sur la table du comité », conclut-elle.

Ce ne sont pas les scientifiques qui peuvent faire changer les façons de faire des politiciens, insiste M. Carignan. « Ces gens pensent à court terme alors qu’il faudra 25 à 50 ans pour rétablir la qualité des eaux du fleuve. Ils ne s’en occuperont pas. Ce sont les citoyens qui ont ces moyens, heureusement », lance M. Carignan.