Honorée pour ses 55 ans de service

LOUISEVILLE. Le 25 novembre, toute l’équipe de Chemise Empire a rendu hommage à Nicole Turenne, une fidèle employée qui est couturière pour l’entreprise depuis 55 ans. Il s’agit d’un record pour la manufacture louisevilloise.

À l’aube de ses 73 ans, Mme Turenne a reçu des mains du député Simon Allaire la Médaille de l’Assemblée nationale pour toutes ces années de travail. Elle a accueilli cette récompense avec beaucoup d’humilité et d’émotion.

« C’est pas croyable ! Mon coeur déborde d’amour. Je veux que vous sachiez que c’est un plaisir pour moi d’être avec vous, s’est-elle exprimé devant son équipe. Jamais je ne me réveille le matin en me disant que je n’ai pas envie de venir travailler. On est une belle gang. »

Blagueuse, Mme Turenne a même ajouté qu’elle allait continuer de travailler encore plusieurs années pour que personne ne batte son record. De toute façon, le mot retraite ne fait pas partie de son vocabulaire.

« C’est quoi une retraite au fond ? C’est de s’en aller en espérant avoir du bonheur ? J’en ai du bonheur ici. Pourquoi changer une formule gagnante, répond-elle simplement. Ici, c’est ma vie. Je ne me vois pas être ailleurs. »

Pleine d’entrain, Mme Turenne confie avoir franchi le cap des 55 ans de service simplement parce qu’elle aime travailler et qu’elle se sent bien chez Chemise Empire. « Je n’ai pas de secret, dit-elle. C’est une journée à la fois. Je me lève le matin et je suis heureuse d’aller travailler. Je suis encore ici parce que je suis heureuse. Si je n’étais pas heureuse de venir travailler, je ne serais pas assez folle pour continuer. En plus, ça me fait bouger. Je vais avoir 73 ans le 26 décembre et je danse encore ! J’ai tous les muscles qui vont assez bien merci. »

Retour dans le temps

Nicole Turenne a fait ses débuts chez Chemise Empire en 1967. « Il faut dire que je n’aimais pas aller à l’école. J’étais en 9e année. Environ deux semaines avant de commencer ma 10e année, j’ai fait des démarches pour me trouver un emploi. La mère d’une de mes amies travaillait ici et je lui ai demandé qu’elle donne mon nom », raconte-t-elle.

Le lundi suivant, elle franchissait les portes de l’entreprise pour la première fois en tant que couturière. « Je ne savais même pas comment coudre ! Je savais que le bout rond de l’aiguille s’appelait le chas et qu’il fallait faire passer le fil dedans. C’est tout ce que je savais sur la couture, lance-t-elle en riant. J’ai quand même commencé, sans technique ni connaissances. La première journée, je me suis un peu découragée et j’ai eu envie de retourner à l’école. »

Mais elle s’est quand même résolue à terminer la semaine. Après les trois premiers mois, bien qu’elle ne répondait pas entièrement aux exigences, elle était déterminée à apprendre, à prendre de la vitesse et, surtout, à mériter chaque sou de sa paie.

« Le plus drôle, c’est que, quelques années plus tard, je suis repassée dans le bureau du patron pour me faire dire j’allais trop vite, que j’énervais des filles, se souvient Mme Turenne. Dans ce temps-là, je pouvais faire de dix à quinze pièces de plus. On était payé à la pièce dans le temps. »

Il lui arrivait même parfois d’être un peu délinquante, comme elle se plait à dire. « Pour me reposer un peu parfois le vendredi, je me cachais des tickets (qu’on remettait pour chaque pièce terminée) durant la semaine. Le vendredi, je donnais le même nombre de tickets, mais je m’étais reposée », relate-t-elle en riant.

En 55 ans de service, son humour et sa bonne humeur l’accompagnent toujours. Sur ce point, rien n’a changé. En fait, la seule chose qui a changé avec les années, ce sont les moteurs de ses machines à coudre. « C’est mon troisième moulin que je brûle. Je les ai trop fait rouler !