Dans la peau d’un travailleur de rue en milieu rural

Le travailleur de rue de la MRC de Maskinongé a un visage et un nom, Dominique Gélinas. Pendant que la majorité des ouvriers se préparent à une journée routinière de type «9 à 5», Dominique n’a aucune idée de ce qui l’attend. Il sait quand il commence, mais pas quand il finit.

«Tu es dans la rue, sans filet, sans support, sans mandat précis, tu dois te rendre disponible et être capable de répondre aux besoins. Ou encore de déceler les besoins et même de les provoquer à la rigueur, pour faire avancer les gens avec qui tu es dans la rue», raconte le patron de Dominique, Michel Purcell, un homme visiblement passionné par le métier.

Partagé entre Louiseville et Saint-Alexis-des-Monts, Dominique parcourt les ruelles et les villages, il attend le moment propice pour intervenir. La clé pour lui est d’arriver à créer un lien de confiance avec sa clientèle.

«Dans 99% des cas, les personnes qui me pagent ont déjà établi un contact avec moi avant. Le lien de confiance prend parfois du temps avant de s’établir, chaque personne a un rythme différent et c’est normal. Contrairement à des dynamiques plus urbaines où les gens se disent: “J’ai un besoin, tu es travailleur de rue, tu vas m’aider à régler mon besoin et puis, on va se revoir si j’ai un autre besoin.” En milieu rural, c’est assez souvent les mêmes personnes qui reviennent, le lien de confiance est donc très important.»

En poste depuis le mois d’avril, Dominique est le quatrième à qui l‘on confie cette tâche dans la MRC de Maskinongé. Il a dû prendre la relève de Patrice Duhaime qui a oeuvré pendant 13 ans sur le territoire.

«Ça n’a pas été évident de remplacer Patrice, admet Dominique. Mais en même temps, j’ai bénéficié de beaucoup d’avantages, parce que le travail a été très bien fait, donc mon travail est respecté et très bien compris.»

Mentionnons que Patrice est encore présent à titre de superviseur, il accompagne Dominique à raison d‘une heure par semaine.

Un monde de préjugés

Selon Michel Purcell, le principal écueil rencontré par notre société réside dans le manque d’écoute et de compréhension.

«Les jeunes ne tolèrent pas les vieux, les vieux ne tolèrent pas les jeunes, les mieux nantis ont des préjugés sur les moins bien nantis, les moins nantis véhiculent des préjugés envers les mieux nantis, les gens scolarisés dénigrent ceux qui ne le sont pas, ceux qui ne le sont pas dénigrent ceux qui le sont. Dans les couples, ça se parle peu, ça se parle mal, même chose dans les familles. On rencontre la problématique à plusieurs niveaux et ça l’amène d’autres difficultés éventuellement. Le monde a besoin de savoir que ce qu’ils racontent a de l’importance. Quand on arrive dans la rue, on ferme notre gueule et on les écoute. Dès le départ, qu’on soit là et qu’on témoigne que c’est important ce qu’ils nous disent, juste ça, c’est hallucinant comme impact.» Le facteur écoute donne donc les lettres de noblesse à une profession encore peu pratiquée au Québec.

«Si on avait à résumer cette pratique-là, c’est être là, avec», conclut M. Purcell.

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