Boissons sucrées: la taxation comme moyen de prévention?

ALIMENTATION. Les boissons gazeuses, les boissons énergisantes ou pour sportifs, les thés glacés, les eaux vitaminées, les cocktails fruités, et autres bonbons en bouteille occupent une place démesurée dans l’assiette des Québécois selon un récent rapport d’Extenso, le Centre de référence sur la nutrition de l’Université de Montréal. Ce qui amène Coalition québécoise sur la problématique du poids a proposé l’imposition d’une taxe sur ce type de produit associé à l’obésité, au diabète, aux maladies cardiovasculaires, à certains cancers et à la carie dentaire.

«Alors que le Québec affiche un déficit de 15 milliards de dollars, la Coalition Poids et plusieurs organismes et professionnels de la santé recommandent au gouvernement d’imposer une taxation sur les boissons sucrées et de réinvestir ces sommes en prévention. Jugée efficace par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et déjà implantée avec succès dans d’autres juridictions, cette mesure fiscale permettrait de réduire la consommation de boissons sucrées et de soutenir des interventions pour faciliter l’accès aux aliments sains dans les milieux défavorisés», avance Corinne Voyer, directrice de la Coalition québécoise sur la problématique du poids.

«La taxation des boissons sucrées réduit l’impact des stratégies de prix de l’industrie et envoie un message clair qu’il s’agit de produits d’exceptions. Cette taxe permettrait d’épargner des souffrances et des coûts évitables, tout en désengorgeant notre système de santé», ajoute Corinne Voyer en indiquant que l’obésité coûte annuellement près de 3 milliards de dollars aux contribuables québécois.

Concernant l’étude d’Extenso, l’organisation créée en 2006 et parrainée par l’Association pour la santé publique du Québec s’inquiète des grandes doses de sucre libre qui se camouflent dans diverses catégories de boissons sucrées, dont certaines sont de plus en plus consommées au Québec, comme c’est le cas avec les laits et boissons laitières sucrées et les boissons au café froid sucrées. «Le sucre se cache derrière plusieurs appellations aux allures parfois «naturelles» dans ces boissons. Celles-ci peuvent même se retrouver à proximité d’aliments frais et dans les allées de produits biologiques et naturels, ce qui peut laisser croire aux consommateurs que ces boissons sont des options saines alors qu’elles ne le sont pas», précise la directrice de la Coalition québécoise sur la problématique du poids.

Selon l’étude exploratoire effectuée par Extenso en 2017 et en 2018, une tasse (250 ml) de boisson sucrée contient 5 cuillères à thé de sucre en moyenne et jusqu’à 11 cuillères. «Avec la consommation d’une seule boisson, on atteint la limite quotidienne de sucres libres recommandée par l’Organisation mondiale de la santé», indique Corinne Voyer.

Ajoutons que plusieurs catégories de boissons camouflent du sucre liquide. Celles qui en renferment le plus sont les boissons gazeuses, les boissons énergétiques, mais également les boissons à saveur de fruits, les laits et boissons laitières sucrés et les boissons au café froid sucrées.  Selon Extenso, ceci est inquiétant en sachant que la consommation de ces deux dernières boissons sucrées a augmenté de 2004 à 2015 selon un rapport de l’Institut national de santé publique du Québec. Toujours pour la même période, la catégorie des cafés et thés sucrés a augmenté de 165 %.

Notons que le sucre liquide se camoufle sous une variété de noms : un total de 22 sources et 14 types de sucre ont été répertoriés dans une même catégorie de boissons. Le sucre et le glucose-fructose demeurent des sucres largement utilisés par l’industrie, mais également les concentrés de jus de fruits, le sucre de canne et les purées de fruits. D’ailleurs, plusieurs sucres aux allures «naturelles» (ex. sucre, jus ou sirop de canne à sucre, miel, sirop de riz brun, nectar d’agave) se retrouvent également de plus en plus dans la composition des boissons sucrées. Le sucre de canne était d’ailleurs le plus utilisé dans les nouvelles boissons sucrées mises en marché en 2018.

Mais attention, «naturelle» ne veut pas dire santé prévient Extenso dans son rapport. Certaines catégories de boissons sucrées renferment également des édulcorants qui accentuent le goût sucré des boissons déjà très sucrées. C’est notamment le cas des boissons à saveur de fruits et des eaux sucrées.

Par ailleurs, l’espace occupé par les boissons sucrées en supermarchés et en pharmacies a également retenu l’attention du Centre de référence sur la nutrition de l’Université de Montréal. «L’espace-tablette occupé par les boissons gazeuses et les boissons à saveur de fruits mesure 20 mètres (65 pieds) en moyenne et jusqu’à 135 pieds en supermarché, ce qui équivaut à la longueur d’une à deux allées de quilles. Cet espace-tablette est malheureusement plus grand dans les supermarchés situés en milieu défavorisé», déplore la directrice de la Coalition québécoise sur la problématique du poids.

Dans les pharmacies, les efforts de promotion sont très variables entre les différentes bannières. De façon générale, les boissons sucrées sont surtout mises en valeur dans un espace réfrigéré de boissons sucrées offertes en format individuel. La mesure de cet espace réfrigéré surpasse même celle de l’espace-tablette dans ce milieu de vente.

À propos de la Coalition québécoise sur la problématique du poids

Créée en 2006 et parrainée par l’Association pour la santé publique du Québec, la Coalition québécoise sur la problématique du poids est appuyée par plus de 700 partenaires issus de la santé, de la recherche, de l’environnement, de la nutrition, de l’activité physique, ainsi que des milieux municipal et scolaire. Son mandat est de revendiquer des modifications législatives, réglementaires et des politiques publiques, afin de favoriser la mise en place d’environnements facilitant les saines habitudes de vie, qui contribuent à prévenir l’obésité et les maladies chroniques.