Quand l’instinct de survie embarque

Attaquée par une ourse, Barbara Hadden réussit à s’en sortir

PORTRAIT. Ce qui devait être une balade en plein air comme tant d’autres auparavant s’est transformé en véritable cauchemar pour Barbara Hadden, le 29 septembre dernier. Sur le chemin de la Régie, qu’elle emprunte régulièrement pour promener son labernois et son berger australien, la résidente de Sainte-Ursule et un de ses chiens ont été attaqués par une ourse. «Mon labernois s’est aventuré trop près de ses oursons», regrette Mme Hadden. Cette incursion pourtant sans malice de la part de Chivas a déclenché la colère de la maman, qui s’est aussitôt mise en mode attaque. «J’ai entendu mon chien hurler comme jamais auparavant. C’était déchirant», indique-t-elle les yeux pleins d’eau. «Il est comme mon enfant, poursuit la dame, la voix brisée. Je voulais le sauver. Je criais. J’essayais de savoir où il était. Je voulais juste qu’il revienne à moi et le ramener à la maison. Quand je me suis penchée dans le boisé pour regarder, j’ai constaté que la distance qui me séparait de la scène était de quelques mètres seulement. Je n’avais pas beaucoup de temps pour réagir. J’ai alors croisé le regard de l’ourse et su qu’elle m’attaquerait.» «J’ai tout juste eu le temps de me retourner et de me mettre en boule. Je savais qu’un ours attaque d’abord la tête ou le cou pour tuer. Je devais me ternir serrée pour éviter ça», poursuit-elle, retrouvant son aplomb.

«Il sautait continuellement sur mon dos. Chaque assaut me transperçait» – Barbara Hadden

L’attaque Puis, l’attaque a commencé, sous le regard terrifié et impuissant de son deuxième chien, figé par la peur dans le chemin. L’ours était de bonne taille; probablement un peu plus d’un mètre de haut, évalue Mme Hadden. «Il sautait continuellement sur mon dos. Chaque assaut me transperçait. Je criais au meurtre. Je l’entendais grogner et respirer dans mes oreilles. Je me sentais tellement petite! Je me disais « No way, ce n’est pas vrai que je vais mourir ici! ».» Après avoir reçu plusieurs coups de griffes dans le dos, la marcheuse a été mordue à l’épaule droite: «J’ai eu la peur de ma vie lorsqu’il s’est mis à me brasser. Il essayait de me virer de bord. Et je savais que s’il réussissait, c’était fini.» Mme Hadden a donc tout fait pour conserver sa position. Lorsque l’animal a lâché son épaule, il l’a mordue au flanc gauche. Puis, il a quitté pour retourner à ses oursons. «Merci bon Dieu!», soupire-t-elle. «Je suis sortie de la fosse et j’ai continué à crier pour appeler mon labernois. Il est apparu ensanglanté, mais j’ai vu qu’il pouvait marcher. On est reparti vers la maison.» Les soins En chemin, Barbara Hadden a sorti son téléphone. Malgré son état de choc, elle a réussi à appeler les services d’urgence. Probablement sous l’effet de l’adrénaline, elle a pu parcourir trois kilomètres avant l’arrivée des ambulanciers. «Je voulais m’éloigner le plus vite possible. J’étais reconnaissante de pouvoir marcher. J’étais presque de retour chez moi quand les secours m’ont rejointe.»

Chivas, le chien qui s’est aventuré trop près des oursons, déclenchant l’attaque. Photo courtoisie.
À l’hôpital, elle a reçu les premiers soins et on lui a fait des points de suture. Elle a aussi été vaccinée contre la rage de façon préventive. «Je n’ai aucune limitation. C’est encore sensible aux endroits où j’ai été mordue, mais tout le reste est correct», dit celle qui bénit le ciel de s’en tirer aussi bien. Son labernois, quant à lui, a subi deux déchirures dans le côté du corps. L’ours l’a également mordu au crâne, près du nez, en plus de le blesser à la joue. Il guérit bien. La suite Les agents de la faune ont emprunté les vêtements lacérés de Barbara Hadden pour obtenir l’ADN de l’ourse impliquée dans l’attaque. Ils veulent la capturer. Ils ont installé des pièges et des cages à proximité de l’endroit où a eu lieu l’attaque. «Aux dernières nouvelles, ils ont capturé jusqu’à présent un mâle et une femelle adolescents, mais n’ont pas encore trouvé la mère des oursons.» Selon des vidéos prises par une amie de Barbara Hadden, au moins deux femelles avec des oursons et quelques ours adolescents sont établis dans le secteur de l’aqueduc. «C’est trop, juge Mme Hadden, qui avait déjà partagé son point de vue à la Faune avant l’attaque. Si j’ai pu m’en sortir, c’est parce que j’étais informée. Je savais quoi faire.» Barbara Hadden a l’intention de retourner sur les lieux de l’attaque, mais seulement lorsqu’une des femelles sera capturée. «À ce moment, je serai accompagnée de quelqu’un, car je ne sais pas comment je vais réagir.» Elle ne se laisse pas arrêter par cet événement malheureux et a repris ses marches en plein air dans un autre secteur: «Je suis une personne de bois. Je suis toujours rendue là. Pour moi, c’est thérapeutique». Elle est consciente d’avoir joué de malchance lors de l’attaque du 29 septembre dernier. «Un ours noir, ça n’attaque jamais pour rien. C’est vraiment parce que mon chien a été trop curieux que ça s’est passé. Autrement, rien ne serait arrivé», conclut-elle.    

Histoires d’ours

Barbara Hadden n’en était pas à son premier face-à-face avec un ours, le 29 septembre dernier. «J’en ai croisé souvent au fil des ans. Et j’ai plein de belles histoires avec eux.» Elle se rappelle entre autres d’une rencontre avec deux bébés orphelins qui, pendant une semaine, la regardaient passer avec ses chiens du haut d’un arbre. «Je les avais appelés « Nic et Pic »», sourit-elle. Elle se souvient aussi de cette balade où elle a ordonné à ses chiens de s’asseoir lorsqu’un ours est sorti du boisé: «Difficile à croire, mais l’ours aussi s’est assis!». Jamais elle n’aurait pensé être attaquée. «J’ai des flashbacks de temps en temps. Maintenant, il faut que ça sorte de mon système. En parler me fait du bien. En plus, tout le monde autour de moi m’offre de l’aide. Ça me fait chaud au cœur de recevoir tout cet amour.»