Les nouvelles règles du fédéral mettent fin aux tournois de pêche au requin en N.-É.

Les tournois de pêche aux requins de la Nouvelle-Écosse, qui pendant 30 ans offraient aux pêcheurs la possibilité de sortir de l’eau l’un des principaux prédateurs de l’océan, ont été annulés après que les autorités ont déterminé qu’ils ne servaient plus à des fins scientifiques.

Pêches et Océans Canada avait autorisé les tournois de pêche au requin en délivrant des permis scientifiques afin que les animaux puissent être étudiés après leur capture. Mais le ministère a informé les organisateurs du tournoi que son programme de recherche n’a plus besoin de spécimens capturés. 

Les organisateurs du Yarmouth Shark Scramble dans le sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, du Petit de Grat Shark Derby au Cap-Breton et du Lockeport Sea Derby dans le comté de Shelburne ont eu trois options s’ils veulent continuer : suivre un modèle de capture et de remise à l’eau dans lequel les requins ne quittent pas l’eau; utiliser tous les requins capturés pour la consommation humaine ; ou trouver une autre organisation pour soutenir la recherche sur les requins capturés.

«La décision de poursuivre ou non l’une de ces options — et la demande de tout permis requis applicable — appartient aux organisateurs de tournois de requins», a déclaré le ministère dans un communiqué envoyé par courriel. Le ministère a refusé d’accorder une entrevue.

Bob Gavel, organisateur du Yarmouth Shark Scramble, s’est dit extrêmement déçu par la directive gouvernementale. Il a indiqué qu’il est impossible pour aucun des tournois de requins de la province de respecter les conditions proposées par le ministère des Pêches.

Pour des raisons de conservation, les participants au tournoi n’ont été autorisés à attraper que des requins bleus depuis 2018, et M. Gavel a déclaré qu’il n’y avait pas assez de demandes pour la viande pour consommer tout ce qui était pêché. Selon lui, essayer de capturer et de relâcher des requins serait trop dangereux à bord des bateaux de pêche bondés. Et aucune autre organisation ne s’intéresse aux requins pour la recherche, a-t-il déclaré.

Les tournois d’août étaient uniques au Canada. «Nous avons des gens de partout au Canada et aux États-Unis qui sont venus au tournoi, et d’aussi loin que l’Australie, a dit M. Gavel. Nous avons des milliers de spectateurs chaque année. Cela a généré beaucoup de revenus pour nos communautés en ce qui concerne les restaurants, les hôtels, le carburant – les gens achètent des souvenirs, et le simple fait d’avoir des gens dans notre ville a créé un véritable élan économique pour nous.»

Le Lockeport Sea Derby a déclaré sur sa page Facebook qu’il n’y aurait pas de pêche au requin cette année en raison des nouvelles règles, et le Petit de Grat Shark Derby a déclaré que le tournoi n’aurait pas lieu cette année en raison des nouvelles exigences de licence.

M. Gavel a qualifié les modalités de Pêches et Océans Canada pour les tournois d’injustes, notant que la population de requins bleus n’a pas été affectée par les tournois.

Soucieux des populations de requins

Un rapport du ministère publié cette année sur les tournois de requins a révélé que les tournois «représentaient 3% des requins bleus tués chaque année au Canada, ayant un effet négligeable sur la population globale». Les responsables du ministère ont déclaré dans le passé que la plupart des requins bleus tués au Canada étaient accrochés par des bateaux de pêche utilisant des palangres pour attraper l’espadon et le thon.

M. Gavel a commencé le tournoi de Yarmouth en 1998 et l’a vu s’adapter au fil des ans. Quatre espèces de requins pouvaient être attrapés au début du tournoi : le requin taupe-bleu, le requin-taupe commun, le requin bleu et le renard commun.

En 2004, le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada a évalué le requin-taupe commun comme étant en voie de disparition, et deux ans plus tard, les comités organisateurs du tournoi ont volontairement exclu l’espèce des prises pour promouvoir la conservation, note le rapport du ministère. Des préoccupations de conservation similaires pour le requin-taupe bleu et le requin-renard commun ont conduit à la modification des conditions de permis en 2018 pour autoriser uniquement les prises de requin bleu.

Le rapport indique que les organisateurs ont également imposé des restrictions supplémentaires pour promouvoir la conservation, notamment en augmentant la taille minimale des requins attrapés à neuf pieds de longueur et en autorisant un requin par participant et trois par bateau.

M. Gavel a fait valoir que le tournoi était principalement un moyen pour les pêcheurs de passer du temps avec leur famille sur l’eau. «Nous sommes une petite communauté de pêcheurs et les pêcheurs, tout ce qu’ils font c’est se consacrer à leur travail, a-t-il déclaré. Mais c’était une façon pour eux d’emmener leurs familles et ainsi de suite pour sortir et s’amuser.»

Les données ont montré que depuis le début des premiers tournois en 1993, un total de 4266 requins ont été pêchés autour de la Nouvelle-Écosse, dont 4193 requins bleus, 52 requins-taupes bleus, 15 requins-taupes communs et six renards communs.

Entre 1993 et 2005, le rapport indique que les prises étaient composées de mâles et de femelles immatures, ainsi que de mâles matures. Les femelles en âge de procréer n’ont pas été capturées «en raison de leur absence des eaux canadiennes», indique le rapport.

M. Gavel se souvient de la première fois où il a ramené un requin.

«Oh, c’est toute une poussée d’adrénaline, a-t-il affirmé. Attraper quelque chose de cette taille qui vous prend parfois trois ou quatre heures pour l’atterrir. Pêcher un requin qui pèse entre 200 et plus de 300 à 400 livres et le ramener. C’est ce genre d’adrénaline. C’est assez fatigant. Et c’est un beaucoup de plaisir.»