Le visage de la jeunesse change

JEUNESSE. La réalité des différentes générations change et les problématiques aussi. Présentement, les jeunes du territoire vivent d’importants problèmes. C’est le constat que font les responsables de la Maison des jeunes l’Éveil jeunesse de Louiseville et du Travail de rue communautaire de la MRC de Maskinongé (TrueC) depuis quelques années. Dans leurs récents rapports d’intervention, on note que des problématiques assez importantes sont vécues par plusieurs jeunes, alors qu’à l’habitude elles sont vécues à l’âge adulte.

Ce constat n’est pas uniquement fait auprès des jeunes qui fréquentent la maison des jeunes, mais il s’agit d’une tendance généralisée sur le territoire. Le coordonnateur du TrueC, Michel Purcell, tente de transmettre ces nouvelles réalités aux intervenants sociaux afin d’adapter les interventions et les services à la réalité du milieu.

Parmi les problématiques décelées au fil du temps, on note l’hypersexualisation, le manque de communication en raison de la nouvelle ère technologique et l’augmentation et le développement des problèmes graves de santé mentale.

«Lorsqu’on travaille dans la rue, on est toujours en amont des réalités sociales et des phénomènes sociaux émergents. C’est préoccupant de voir que les jeunes développent autant de problèmes et si rapidement dans leur vie», affirme d’entrée de jeu M. Purcell.

Selon lui, le rythme effréné de la vie contribue en majeure partie à ces nouveaux phénomènes. «Prendre le temps de faire quelque chose, c’est devenu un luxe de nos jours parce que le temps c’est de l’argent. Le monde a besoin d’argent. À partir de là, quand t’as du temps, tu ne le perds pas et tu travailles! Les jeunes subissent beaucoup de pression, car on les voit comme des travailleurs alors que ce sont des enfants. On voit les jeunes à travers une seule lunette et on veut qu’ils produisent!», croit-il.

Toujours selon lui, il serait préférable de reconnaître le déterminant du développement d’un jeune, soit l’expérimentation. Les deux organismes de la MRC de Maskinongé croient que l’État entrevoit la jeunesse uniquement par son potentiel de productivité. Les projets comme Katimavik et Jeunesse Canada Monde permettaient, selon eux, des alternatives d’apprentissage et d’épanouissement. «Les jeunes doivent se découvrir, se définir et ce n’est pas à l’intérieur des structures offertes qu’ils peuvent le faire présentement. Lorsqu’ils ont un problème, ils sont exclus et subdivisés en fonction des problématiques. Ils doivent rencontrer plusieurs intervenants différents et il y a un manque de communication entre eux alors le jeune tourne en rond et n’arrive pas à s’en sortir», souligne pour sa part Marc Bellemare, coordonnateur de la Maison des jeunes l’Éveil jeunesse.

Surspécialisation

La Maison des jeunes et le Travail de rue communautaire confirme que les effets de la surspécialisation des services auprès des jeunes sont importants. «Avec tout ça, on ne reconnait plus le rôle et l’importance des parents dans l’éducation. Plusieurs parents se sentent incompétents et on ne fait pas grand-chose pour les valoriser dans leur rôle. Des gens comme nous permettent d’aider un jeune directement en le prenant comme une personne et non pas comme un problème. La déresponsabilisation y est pour beaucoup maintenant. On ne donne pas assez de corde aux parents pour élever leurs enfants», rapporte Michel Purcell.

Stupéfiants

Les intervenants rencontrés font également un lien avec la consommation de drogues. Ils rapportent que la drogue de prédilection est maintenant les amphétamines. Pourquoi? Parce qu’elle est accessible, le coût est minime, les effets sont rapides et la substance est adaptée à la jeunesse. «Les personnes veulent se dépasser, aller à l’école et élever les enfants en même temps. Ces pilules permettent de ne pas manger, de ne pas dormir et de quand même bien performer. Il y en a trop et c’est préoccupant», commente le coordonnateur de la Maison des jeunes l’Éveil jeunesse.

L’école avant tout

De ces jeunes affectés par un problème ou un autre, plusieurs décrochent de l’école parce qu’ils ne réussissent pas dans le cadre offert présentement. «Si un jeune a de la difficulté à composer avec le cadre qu’on lui propose et qu’on ne lui offre pas d’autres solutions, il ne pourra pas réussir et les intervenants vont courir après sans obtenir nécessairement les résultats escomptés», indique M. Purcell. Or, pour assurer une réussite à la plus grande quantité de jeunes possible sur le territoire, les deux organismes croient que la Maison familiale rurale située à Saint-Alexis-des-Monts était une solution innovatrice, différente et sur mesure pour permettre aux jeunes de reprendre le droit chemin. Toutefois, le manque de financement aura contribué à la fermeture de cette institution scolaire au mois d’août 2013.

«On parle beaucoup de décrochage et on sait très bien que les jeunes qui décrochent ont la plupart du temps des problématiques. C’était une possibilité de récupérer ces jeunes et qu’ils se prennent en main. Au lieu de s’adapter aux jeunes, on tente d’adapter les jeunes au système d’éducation sans aucune autre possibilité», conclut Michel Purcell qui a plus de 30 ans derrière la cravate en travail de rue. En 2015, la Maison de jeunes l’Éveil jeunesse de Louiseville fêtera son 20e anniversaire tandis que le Travail de rue communautaire de la MRC de Maskinongé célèbrera son 30e anniversaire.